Edmond et Jules de GONCOURT, Manette salomon (1867), Paris, Gallimard, 1996, p. 182-183. 10 15 20 25 30 35 or 2 Sni* to View On goûtait la journée, la fatigue, la vitesse, le plein air libre et vibrant, la réverbération de l’eau, le soleil dardant sur la tête, la flamme miroitante de tout ce qui étourdit et éblouit dans ces promenades coulantes, cette ivresse presque animale de vivre que fait un grand fleuve fumant, aveuglé de lumière et de beau temps.
Des paresses, par instants, prenaient le canot qui s’abandonnait au fil du courant. Et lentement, ainsi que ces écrans où tournent les tableaux sous les doigts d’enfants, se déroulaient les deux rives, les verdures trouées d’ombre, les petits bois margés d’une bande d’herbe usée par la marche des dimanches ; les barques aux couleurs vives noyées dans l’eau tremblante, les moires remuées par les yoles attachées, les berges étincelantes, les bords animés de bateaux de