CHEMINS DU RETOUR OU L’IMPOSSIBLE ESCALE. Adamou Kouakou Dongo David Assistant, Université de Cocody – Abidjan (Côte d’Ivoire) adamoukossia@yahoo. fr Résumé Véronique Tadjo, poétesse ivoirienne, présente dans son recueil de poèmes Chemins du retour divers visages de Ferrance. On a l’errance à Pintérieur de soi visible dans la métaphore du miroir qu’exprime cette inte cherche à travers so à travers la pluralité contiguë à la quête d chemin entre ciel et t or29 S »ige to View ‘un regard qui se l’errance des lieux Cette errance est ui-même à mi- e scripturaire lisible dans la forme archipellique des textes.
En d finitive, cette poésie est faite de plusieurs escales où le poète erre, sans trouver la berge où mouiller le navire. Mots-clés Errance, escale, aérosphère, soliloque, monologue INTRODUCTION Chemins du retour est le deuxième recueil de poèmes de l’auteure, après Latérite. L’image de l’errance est visible dans ce livre mais sous un angle qui semble très original au regard de la définition de cette notion. Il faut, à cet effet, se référer au livre intitulé Figures de l’errance de Dominique Berthet.
Dans son Avant-propos, Fauteur fait un large tour d’horizon au terme uquel on retient du concept de l’errance deux acceptions essentielles. L La première émane de la définition du verbe latin errare. Sous cet angle, l’errance a une image négative et reste intimement liée à la notion de vagabondage, d’erreur. C’est dans cet esprit que le Littré définit ce dernier terme comme « Action d’errer çà et là. Action d’errer moralement ou intellectuellement ; état d’esprit qui se trompe L’errance est donc envisagée comme un égarement, une absence de but. ? On la décrit — dit Dominique Berthet — comme une obligation ? laquelle on succombe sans trop savoir pourquoi, qui nous jette ors de nous-même et qui ne mène nulle part. Elle est échec pour ne pas dire danger. L’errance, toujours vue sous cet angle, s’accompagne d’incertitude, d’inquiétude, de mystère, d’angoisse, de peur. C’est une épreuve. Elle est perte de soi-même. De ce point de vue, elle est opposée à la notion de plaisir. Cette conception de l’errance négative envisage l’errant comme un être égaré, désœuvré, à la dérive, sorte de SDF de notre période contemporaine.
Bref, elle est considérée comme relevant d’un comportement déviant. » Une telle conception de Perrance suppose une crise du sujet N’ayant pas d’itinéraire, ni d’objet de quête, il est soumis à une espèce de circularité infructueuse qui ne mène nulle part. Le sujet errant est pour ainsi dire un sujet isole, exclu de la communauté par une force qui semble être une malédiction. Etant entendu que le feu intérieur qui le pousse au mouvement n’offre à l’errant que le visage infécond OF entendu que le feu intérieur qui le pousse au mouvement n’offre à l’errant que le visage infécond de l’espace.
A cette forme de l’errance, il convient d’en opposer une autre. Celle-ci dérive, selon Berthet, du bas-latln iterare. Etre errant, dans ce cas, ? c’est être, à un moment donné, sans attache particulière, allant d’un lieu à un autre, en apparence sans véritable but. En apparence seulement car l’errance, est une quête ; une quête d’autre chose, d’un autre lieu qu’Alexandre L’aumônier appelle le « lieu acceptable ». Le terme de l’errance a ici une acception positive. Le sujet errant est un itinérant. Il a un but et des destinations. C’est la multiplicité des lieux visités qui valent au sujet d’être en errance.
Chemins du retour de Véronique Tadjo tient à ces deux formes d’errance. Peut-être faut-il, à cet effet, observer déjà le titre e l’ouvrage. On a le substantif CHEMINS. Il se termine par s, marque du pluriel. Les voies de retour au lieu de départ sont donc nombreuses et semblent supposer le nombre de lieux visités. En revanche, le lieu de départ est unique. C’est ce qui explique le nombre singulier de retour. Deux interprétations sont alors possibles. La première est celle d’un seul aller et un seul retour entre lesquels figurent des interlignes.
Le sujet errant est Ici un itinérant disposant d’un nombre précis de lieux dont la fréquentation fait décroître au fur et à mesure le nombre et rapproche du retour. C’est le cas d’une errance po 3 OF fréquentation fait décroître au fur et a mesure le nombre et rapproche du retour. C’est le cas d’une errance positive. On note également une autre forme d’errance. Celle où les différents chemins du retour sont Instantanés et expliquent une situation de hantise de [‘origine, lieu de départ. Le sujet est dans une situation d’exil physique et/ou mental.
Sa condition d’exilé exprime son malaise qui peut avoir divers visages. Il faut noter celui de l’obsession d’un espace abandonné que le sujet aspire ? retrouver. Celui également d’un espace antipathique qui pousse ? l’ailleurs. Celui, enfin, d’un espace antipathique qu’on souhaite voir devenir un lieu de rêve. Dans les quatre cas, il y a errance, lisible dans une déterritorialisation mentale et physique. Envlsager fétude de Chemins du retour comme une impossible escale, c’est considérer ces deux formes de l’errance, sous leurs visages respectifs dans l’œuvre, à travers le fonctionnement du discours. espace discursif est, en effet, un lieu fragmenté dont les différents éléments sont en interaction perpétuelle ou en rejet. Le sujet du discours, c’est-à-dire le locuteur, est toujours ans une posture fantomatique, s’effaçant derrière un allocutaire qui, pourtant, ne désigne personne d’autre que le locuteur lui- même. Ily a là un soliloque et un monologue qui traduisent un éclatement du sujet. L’objet du discours, unique, qui est celui du retour au pays natal, se présente sous un visage multiple qui est celui du retour au pays natal, se présente sous un visage multiple.
II est la maison abandonnée, la résurrection, les dures réalités de l’existence, l’amour. Quant à l’espace référentiel, on note qu’il est l’intérieur d’un avion, un aérosphère suspendu entre ciel et terre et qui se dérobe ? ‘un comme à l’autre. L’errance positive à laquelle obéit le retour au pays natal après une mission se mue, par la charge émotionnelle que supposent les souvenirs rattachés au lieu d’origine, en une espèce de hantise qui elle, est une errance négative. – L’ESPACE REFERENTIEL . UNE DEROBADE. espace référentiel est le lieu à partir duquel l’énonciateur émet le discours. C’est un lieu objectif au sens où il matérialise la présence physique, réelle de l’encodeur. Il permet de saisir le sujet du discours dans sa présence au monde, de le situer dans un espace-temps concret, par son « je-ici-maintenant ? , selon les termes de Meschonnic. L’espace référentiel dénonce la médiation, c’est-à-dire la désignation par temps et espaces interposés. Il se pose comme le lieu de l’actualisation du discours et comme l’actualité de l’objet de ce discours.
On peut le considérer comme le témoin incorruptible de l’acte d’énonciation, étant entendu que c’est lui qui prête son cadre et ses outils ? l’énonciateur. L’espace référentiel est, pour ainsi dire, le contexte de l’énonciation PAGF s OF outils à l’énonciateur. L’espace référentiel est, pour ainsi dire, le contexte de l’énonciation qui personnalise l’énoncé. Il donne à celui-ci un visage particulier en dotant l’objet du discours de slgnes personnels. Dans Chemins du retour, l’espace référentiel est nommé.
Cest l’intérieur d’un avion. Cette désignation fait du lieu évoqué un des éléments constituants de l’énoncé. Le lieu nommé devient ainsi une création de l’encodeur et cesse d’être un objet extralinguistique. Ainsi, on note, par cette évocation, une crise de la « référentialité » car un lieu objectif qui prête son cadre ? l’encodeur ne peut nullement être un élément du discours. Etant lui-même un métadiscours dont l’encodeur est Pun des produits, ‘espace référentiel ne peut être une création.
Le devenant, il perd la matérialité de son existence objective pour s’engager dans le moule de la subjectivité de l’encodeur. L’évocation du lieu dans Chemins du retour qui fait d’un espace référentiel un référent textuel explique une crise du sujet et de l’espace. Cintérieur de l’avion évoqué semble n’avoir d’existence véritable qu’en tant que symbole d’une fuite permanente, d’une déterritorialité. De même, le sujet du discours, en nommant l’espace en perpétuelle dérobade, tente de se l’approprier et de ‘en servir comme monture vers l’ailleurs désiré.
Il y a donc une double évanescence, visible dans la fuite conjointe de l’espace et de la pensée. A-UNE AEROSPHERE MOBILE: UNE PRÉSENCE EN dans la fuite conjointe de l’espace et de la pensée. A-UNE AEROSPHERE MOBILE: UNE PRESENCE EN FUITE Ce texte de Véronique Tadjo donne à ferrance l’image d’une élévation. L’espace matériel se dissout au profit d’un univers abstrait, lui-même se consumant pour laisser place à un vide. Mais ce vide est fortement animé de la conscience d’une présence absolue mais invisible, une présence-absence, une résence en fuite.
Voir en l’avion le symbole de la déterritorialité, c’est le dés’gner comme le moteur de Ferrance ; du moins le moyen par lequel l’errance prend forme. Suspendu entre ciel et terre, mais se dérobant aux deux espaces, l’engln semble indiquer la trajectoire d’une errance absolue. Depuis le premier texte du recueil, en effet, l’aérosphère apparaît comme le moyen de dompter l’exil. Etre sur le chemin du retour, dans l’évanescence, c’est se soustraire à tout espace référentiel délimité et coercitif. Dans cet avion qui t’emmène au pays, tu flottes comme une idée abstraite.
Et c’est ton esprit qui se déplace, qui doit se réhabituer, se réadapter, tout se remémorer. Ouvrir les fenêtres. Nettoyer la maison. Préparer la table. En peu de temps, tu dois combler un siècle. Chemins du retour, p. 5 On observe une abstraction visible dans la désagrégation de tout objet matériel. Le corps cède à l’esprit et la certitude d’une réalité présente cède à la mémoire. Même l’intérieur de l’avion, élément isolant et englobant, ne garantit pas la présence en s 7 OF Même l’intérieur de l’avion, élément isolant et englobant, ne garantit pas la présence en son sein du sujet.
On est en présence d’une dissolution de l’espace référentiel qui se prolonge dans la fonte de tout objet physique en élément abstrait. Le sujet se confond-il avec l’avion au point de flotter comme lui, ou ouvre-t- il un chemin parallèle pour diversifier les itinéraires ? Dans un cas comme dans l’autre, on note une fuite permanente et un refus de l’ancrage. L’errance offre ici un schéma de ce mouvement escaladant qui part de la matière à l’idée et de l’idée à une absence totale. Cette absence est qualifiée d’absolue parce qu’elle instruit une mémoire et informe un avenir.
Il faut entendre ue les éléments dont le poète fait l’inventaire, c’est-à-dire la table, la maison, la fenêtre, appartiennent au passé du sujet. Mais les actions d’ouvrir la fenêtre, balayer la maison, faire la table sont des projets. Elles s’inscrivent dans l’avenir _ Le sujet du discours est réel par son histoire que représente les objets désignés, et absolue par son inscription dans l’avenir. Cela explique une présence permanente du sujet du discours ou la conscience d’une présence absolue mais invisible.
On passe alors de la destruction de l’espace référentielle à la légitimation d’un espace virtuel. L’espace est alors en mutation perpétuelle. S’il semble incarner un absolu, puisqu’il survit au présent en déslgnant le futur, il ne manque pas de supposer un irréel par cela même qu’il 8 OF puisqu’il survit au présent en désignant le futur, il ne manque pas de supposer un irréel par cela même qu’il rompt avec la matérialité d’une présence concrète. Il est certain que la projection dans le futur confirme l’existence d’un sujet qui s’immortalise.
Toutefois, cette existence est sans support matériel et le sujet n’est plus finalement qu’un esprit, une volonté, une pensée, un rêve. Ily a là une présence par la réalité d’une vision. Mais cette présence est également une absence parce que le projet, du fait qu’il est projet, se dérobe au présent et ? la réalité. Cette présence-absence implique une évanescence, lisible également dans la suite du texte sous la forme d’une dérobade. Celle-ci est exprimée à travers les formes négative et interrogative des verbes, l’expression récurrente du verbe oublier.
On note que dans la suite du poème, le sujet du discours est une présence-absence soumise à une métamorphose perpétuelle, tant son objet est évanescent. Un certain pessimisme dans le discours traduit l’inaccessibilité de la destination, objet de la quête. Cela se lit plus intensément dans les formes négative et interrogative de certains verbes, et dans le mode impératif du verbe oublier qu’on retrouve de façon récurrente dans les pages allant du numéro 12 au numéro 14.
A ce propos, il faut mentionner que cet impératif et ce verbe oublier imposent comme une rupture avec le passé et désagrègent la mémoire. Oublie le souvenir/ qui te retient/ et PAGF OF avec le passé et désagrègent la mémoire. Oublie le souvenir/ qui te retient/ et l’empêche d’avancer/ le ouvenir/ encore et encore/ pour te dire/ que les choses/ ne sont plus les mêmes/ que tes rêves/ n’ont pas survécu/ aux saisons sèches. p. 2 Oublie qu’hier/ tout était possible/ et trouve une ligne/ à ta vie/ un chemin à parcourir/ qu’il pleuve/ ou qu’il vente/ que tu aies/ les larmes aux yeux/ ou le sourire aux lèvres p. 13 Oublie tes vieilles idées/ tes souliers usés/ et regarde-toi/ en face/ La solitude/ ne t’a jamais/ quttée. p. 14 L’impératif ici fonctionne comme une exhortation à la rupture avec un passé, avec des rêves pendant longtemps nourris d’espoir et qui semblent désormais absurdes. Les syntagmes le souvenir, qu’hier, tes veilles idées, définissent ce paradigme de la mémoire qu’il convient de détruire.
L’allure pessimiste de cette exhortation se remarque également dans les formes négative et interrogative des verbes. Aux pages 10 et 11 on peut lire tu ne te reconnais plus tu ignores jusqu’? l’écriture de ton nom et le son de ta voix p. 10 tu ne connais aucun chemin par cœur et les détours te font peur la ville a changé plus vite que toi elle ta filé entre les doigts p. ll Les termes comme tu ne te reconnais connais aucun chemin pa lus, tu ignores, tu ne isentr par l’allure négative