LE SUICIDE Intro Et Resum Et Page De Garde

LE SUICIDE, L’ENVERS DE NOTRE MONDE, R. ESTABLET C.

BAUDELOT org Sni* to View Aghmir Sahra Plateaux Marlène De nombreuses recherches confirment régulièrement ces constats : le taux de suicide dans une société est au plus bas en situation de croissance économique et de développement des infrastructures de protection sociale (comme entre 1945 et 1975) ; ce sont les exploitants agricoles (et parmi eux ceux à la tête des exploitations les plus fragilisées), les ouvriers et que les pauvres, alors que des relations inverses s’observaient ? la fin du XIXe siècle ; souvent le suicide est plus fréquent chez les eunes adultes que chez les plus âgés ; et la Chine voit les femmes se tuer davantage que les hommes.

Adoptant une démarche avant tout comparative, Christian Baudelot et Roger Establet s’attaquent de manière sélective à la montagne des statistiques de suicidité disponibles à l’échelle planétaire ; ils élargissent en outre leur corpus à une vaste littérature qualitative sur le suicide qui, elle, couvre aussi les sociétés d’autosubsistance. Leur analyse s’organise autour de trois questions principales quels sont les liens entre richesse et suicide, entre âge et suicide, entre sexe et suicide ? Les réponses progressivement apportées forment des carcans qui donnent son unité à l’ouvrage. RÉSUME Le livre de Baudelot et Establet s’inscrit dans la tradition durkheimienne d’analyse statistique du suicide. S’ils empruntent leurs méthodes au maître, les sociologues français contestent une grande partie des résultats de ses recherches.

L’ouvrage débute avec une critique radicale de l’affirmation de Durkheim voulant que la misère protège du suicide, lui donnant une place qu’elle n’a pas dans l’œuvre de Durkheim. Le ton est donné, c’est dans le champ économique que les auteurs trouveront Pessentiel e leurs expllcations et ils font peu de cas de la famille ou de la religion. En fait, ils en discutent brièvement dans deux chapitres, utilisant des chiffres internationaux, et ils n’y reviennent qu’en conclusion pour reconduire celle de Durkheim… CYentrée de jeu, les auteurs affichent leurs couleurs. Ils n’ont pas le projet d’expliqu *AGF 9 rif q Durkheim… D’entrée de jeu, les auteurs affichent leurs couleurs. Ils n’ont pas le projet d’expliquer le suicide au plan individuel.

Une de leurs sections s’intitule « Ce n’est pas la société qui éclaire le suicide, c’est le suicide qui éclaire la société » (pl 5). Signe des temps, l’horizon spatial de leur analyse n’est plus l’Europe comme dans les études de Durkheim ou Halbwachs mais le monde entier, enfin la partie pour laquelle ils disposent de statistiques. Même s’ils reprennent la théorie de l’intégration sociale de Durkheim, leur approche les amène à distinguer des dynamiques sociales différentes selon les sociétés qu’ils examinent. Ils rejettent tout particulièrement la typologie du suicide de Durkheim, « ce chapitre chimérique sur les formes prises par les suicides selon qu’ils soient ‘déterminés’ par l’anomie, Yaltruisme ou l’égoïsme » (p. 246).

Ils reprochent à Durkheim son sociologisme, sa prétention à tout expliquer. D’ailleurs, ils ne dialoguent guère avec les psychologues, leur reconnaissant plutôt la capacité de donner sens à l’acte commis par les personnes suicidées. Ils puisent toutefois abondamment chez les anthropologues pour mieux comprendre les cultures nan occidentales, asiatiques notamment. Suicide, l’envers de notre monde est divisé en neuf chapitres. Le premier pose la perspective des auteurs. Les trois suivants traitent du suicide dans une perspective historique. Deux chapitres sont consacrés à l’étude de l’effet de la classe sociale. Les deux derniers portent sur la situation particulière des jeunes et des femmes respectivement.

Un chapitre est consacré à la situation exceptionnelle de la Russie depuis l’acceptation du suicide au début chapitre est consacré à la situation exceptionnelle de la Russie depuis l’acceptation du suicide au début de l’ère communiste jusqu’à son rejet honteux à l’époque stalinienne. La chute du réglme soviétique reçoit une attention particulière, le suicide faisant cortège aux profonds bouleversements sociaux, un symptôme parmi d’autres, falcoolisme et la violence notamment. D’emblée, les auteurs s’engagent dans la démonstration de ce qui constitue l’idée force de leur ouvrage : le suicide, plus précisément la variation des taux de suicide, répond aux inflexions économiques.

Toutefois, malgré la démonstration convaincante du lien entre la pauvreté et le suicide dans les pays riches, les auteurs montrent tout aussi bien que les pays les plus pauvres sont ceux où l’on se tue le moins, sauf pour les pays de l’ex-bloc soviétique. Le lien entre richesse, pauvreté et suicide est donc fort complexe et ils présentent leur approche comme pouvant en dénouer l’enchevêtrement, c’est ainsi une émarche historique qui n’a rien de linéaire et s’étend sur tous les continents. Baudelot et Establet commencent leur analyse historique par deux pays entrés depuis peu dans le monde industriel, la Chine et l’Inde. Ils esquissent le parallèle entre ces derniers-nés de la clvilisation industrielle et les pays européens au moment où la hausse fulgurante de leurs taux de suicide désolait Durkheim.

Comme eux, le décollage de leur économie a entrainé celle de leurs taux de suicide. Bien que manquent les séries statistiques longues pour en faire l’étude, les auteurs voient en la Chine la ême tendance qu’en Inde où les statistiques sont plus fiables. En effet, l’Inde contemporaine est mar qu’en Inde où les statistiques sont plus fiables. En effet, l’Inde contemporaine est marquée par un accroissement rapide des taux de suicide dans les villes les plus développées et ce, plus particulièrement chez les gens les plus instruits. « En s’individualisant, [les gens instruits] deviennent aussi plus vulnérables. L’éducation est à la fois une cause et un effet de l’individualisme » (p. 47).

La poursuite du développement industriel et l’individualisme qui en découle devraient avoir omme conséquences une hausse continue du taux de suicide. Or, l’exemple européen dément cette prédiction puisque les taux de suicide y ont généralement baissé au cours du XXe siècle, disqualifiant du coup la théorie liant strictement l’individualisme au suicide. Deux chapitres lui sont consacrés. Les auteurs montrent en effet avec plusieurs séries statistiques que le taux de suicide n’a cessé de baisser entre 1900 et 1970 et pas seulement en France ou en Angleterre dont ils font une analyse plus fouillée. Or, le rythme des changements sociaux, politiques et économiques a été effréné au XXe siècle.

En Angleterre, les taux ont baissé rapidement. « Après avoir durant un siècle désorganisé la vie sociale, la révolution industrielle anglaise a finalement fourni des ressources matérielles et morales aux jeunes, aux urbains et aux ouvriers plus que le désert des campagnes » (p. 63). En France, la croissance presque continue du pouvoir d’achat, et ce jusqu’à la fin des Trente Glorieuses, est accompagnée d’une baisse ou de la stagnation des taux de suicide. Pourtant, pendant toutes ces années, les facteurs d’aggravation se sont amplifiés. Ils montrent à l’aide de données international nnées, les facteurs d’aggravation se sont amplifiés.

Ils montrent à l’aide de données internationales que, à richesse constante, la fécondité, le divorce et la baisse de la pratique religieuse sont restés des facteurs d’aggravation du suicide en ce sens que les pays qui ont les plus haut taux de suicide sont ceux où l’on a moins d’enfants, on divorce le plus et dont la pratique religieuse est la plus faible. Comment expliquer cette apparente contradiction ? Baudelot et Establet proposent en réponse un facteur de protection inédit, Vindividualisme créatif. Ils empruntent le oncept à Ronald Inglehart, l’initiateur du World Values Survey (WVS). Lui et son équipe ont développé deux variables construites comme des oppositions. La première distingue les valeurs traditionnelles des valeurs lai@ues et la seconde, les valeurs de lutte pour la survie de l’individualisme créatif. Comme on pouvait s’y attendre, les pays où les valeurs laïques dominent sont plus propices au suicide.

La présence de l’individualisme créatif produit l’effet contraire. Les pays ex-communistes devraient leurs forts taux de suicide à la domination des valeurs laïques sans la présence de l’individualisme créatif. Les auteurs oient l’indivldualisme créatif comme le complexe de valeurs « qui, s’opposant aux simples valeurs de ‘lutte pour la survie’, concourent à valoriser l’individu et à construire du collectif ? partir de la reconnaissance des qualités et des compétences personnelles. C’est dans l’univers du travail que se manifestent avec le plus d’efficacité ces valeurs d’exaltation de soi » (p. 99). L’individualisme créatif appartiendrait donc à ceux qu peuvent jouir d’un travai 99).

L’individualisme créatif appartiendrait donc à ceux qui peuvent jouir d’un travail gratifiant. Voilà ce qui entraîne Baudelot et Establet vers une analyse des lasses soclales assez classique, qul s’étend sur deux chapitres. Premièrement, ils expliquent que les taux de suicide soient plus élevés en campagne qu’en ville par le différentiel de richesses et la présence d’emplois gratifiants dans les centres urbains. Les chiffres sur le suicide aux États-Unis, en France et en Grande Bretagne le démontreraient. Les États, les départements et les villes les plus riches et dont la population est la plus éduquée sont moins touchés par le suicide que les plus pauvres. ne analyse détaillée du taux de suicide par profession en France, n des rares pays à profiter de statistiques aussi complètes, montre que chez les hommes le taux de suicide suit l’échelle socioéconomique. Le statut influence beaucoup moins la gent féminine. Les femmes des professions libérales par exemple sont particulièrement exposées au suicide. Les auteurs n’expliquent pas de façon satisfaisante cette différence entre les deux sexes. Outre l’effet de la classe sociale, Baudelot et Establet considèrent deux caractéristiques du suicide contemporain, la croissance des taux chez les jeunes et la persistance de faibles taux de suicide chez les femmes. Dans le premier cas, les auteurs ne font que poursuivre leur analyse économique en l’appliquant au cas particulier des jeunes.

En effet, la hausse rapide et importante du suicide chez les jeunes au cours des années 1970 observée dans de nombreux pays occidentaux correspond à la fin des Trente Glorieuses, à la fin de la croissance planifiée et prévisible occidentaux correspond à la fin des Trente Glorieuses, à la fin de la croissance planifiée et prévisible et au premier choc pétrolier. Les jeunes seraient les premières victimes de ce changement de régime économique, les travailleurs plus âgés profitant des rotections sociales obtenues pendant la période de prospérité. À la fin des années 1990, le suicide des jeunes baisse alors que se stabiliserait le nouveau régime économique. La situation des femmes est plus ambiguë. Les auteurs distinguent le suicide féminin occidental du suicide féminin asiatique.

La Chine est caractérisée par un taux de suicide féminin plus élevé que celui des hommes. C’est une exception detaillée et l’Inde ainsi que de nombreux pays asiatiques ne sont pas très loin de la situation chinoise. Cest roccident qul falt figure d’exception. Les auteurs proposent une nouvelle catégorie typologique, e suicide vindicatif, pour décrire cette forme de suicide des femmes. La position des femmes et plus particulièrement des jeunes épouses, totalement inféodées à la mère de leur mari dans une société patrilocale, serait à la source de cette vengeance du faible. La mort de la bru ferait perdre la face à la belle- mère.

Les femmes asiatiques auraient-elles une moins grande émotivité ? Fait significatif, le taux de masculinité tend à s’inverser dans les villes industriallsées, à l’occidentale. En Occident, les auteurs suivent une autre ligne de pensée. Alors qu’en Orient on pouvait voir dans leur raisonnement une suite e l’intuition de Durkheim voulant que les femmes aient besoin de plus de liberté et les hommes, de davantage de contrainte, les auteurs voient le rôle des femmes dans runivers af hommes, de davantage de contrainte, les auteurs voient le rôle des femmes dans Punivers affectif comme la source de la protection des femmes contre le suicide.

Le fait que, contrairement aux hommes, les femmes exprlment et partagent leurs émotions les protégerait des effets de l’angoisse si délétère pour les hommes. Jautre part, on peut se demander si l’on n’est tout simplement pas devant une simple explication biologique, les emmes étant par leurs fonctions maternelles les détentrices de l’émotivité. En conclusion, Suicide est un ouvrage intéressant, stimulant même. Il a le défaut de ses qualités. Il se donne le monde comme scène mais il y perd l’analyse fine, malgré quelques efforts pour amener des distinctions au sein de la Chine et de l’Inde. Les auteurs n’arrivent pas à articuler les multiples dynamiques qui animent nos sociétés. Ils s’engagent plutôt dans une logique économiciste.

Les données utilisées sont intéressantes mais s’ils critiquent les données soviétiques ou chinoises, ils acceptent elles des autres pays sans rien en dire de leur caractère massif. Plutôt que d’essayer de comprendre comment la transformation de la famille, la situation des femmes et l’évolution économique interagissent, ils utilisent le blâme pour éviter d’avoir à faire une analyse plus fine allant jusqu’à dire que la crise de la famille est un « écran de fumée h. Dans une société où les moyens de communications se diversifient, le multiplient et s’imposent de plus en plus au sein des foyers on peut se poser la uestion du lien social et de sa nouvelle définition *AGF g c,Fq des foyers on peut se poser la question du lien social et de sa