Effectuation Les principes de l’action entrepreneuriale Philippe Silberzahn 2 DU MÊME AUTEUR Constructing Cassandra: Reframing intelligence failures at the CIA, 1947-2001 avec Milo Jones, Stanford University Press, parution été 2013. Une étude sur la gestion de l’incertitu des surprises or 119 stratégiques dont a é – Sni* to View nextÇEge The balancing act of 2011. Une série de existantes à partir an Dyck, Lannoo, cas « ordinaires » mais passionnants d’innovation, loin des exemples habituels médiatisés. Objectif Innovation : Stratégies pour créer l’entreprise innovante, avec Jean-Yves
Prax et Bernard Buisson, Dunod, 2005. Une introduction générale à l’innovation. Copyright C 2013 Philippe Silberzahn Tous droits réservés Édition du 6 février 2013 4 4. Effectuation: Les cinq principes de la logique jale 29 Principe no 1 : Un tiens vaut mieux que deux tu experts en prévision. Mythe n04 : Les entrepreneurs ne sont pas comme nous. . Mythe nos : Les entrepreneurs réussissent effectuation Prlncipe n05 : Pilote dans seuls — 3. Causation et Logique causale, Logique effectuale L’exemple de Ll- 22 .. 24 27 entrepreneu l’auras .
Principe n02 : Raisonner en Perte acceptable. Principe n03 : Patchwork Principe n04 : Limonade — — l’avion 5. Entrepreneuriat, risque et incertitude . 32 34 36 37 40 Entrepreneuriat, risque et incertitude: l’apport de l’économiste Frank Knight ….. 40 Incertitude et prevision 42 Gaston Berger, ou les racines française de l’hostilité à la prévision . Allocation, découverte, création: Les trois conceptions du 53 59 renversée 59 69 entreprendre ? 6. La création de marché . 47 marché. Qu’est-ce qu’une opportunité ? Vision créative . 1 Il n’y a pas de marché mature – Tout marché peut être recree . Engagement entrepreneurial et création de marché: Le concept ‘isotropie .. 55 7. Le processus entrepreneurial Individu, idée, opportunité et projet viable : une logique Le processus entrepreneurial effectual La co-création avec les premiers clients La difficile question des premiers clients……. „……………… La question de l’optimum local. 8. Piloter la démarche entrepreneuriale . … 62 64 70 73 Combiner les logiques effectuale et causale dans la démarche entrepreneuriale Faut-il un plan daffaire pour 75 g.
L’entrepreneuriat, 3 DF11q 9. L’entrepreneuriat, c’est pour tout le monde 77 Le désir de création est universel: tout le monde peut être ntrepreneur Culture du risque, culture de fincertitude: un enjeu crucial pour la formation des décideurs . L’incertitude nous rend libres 10. Conclusion…. 82 1 1 . Lecture recommandées . 12. À propos de l’auteur 6 1. Introduction L’entrepreneuriat tel qu’il se fait 78 . 80 83 84 On ne compte plus les rapports alarmistes sur l’état de l’innovation en France, surtout depuis le début de la crise économique en 2008.
Les solutions préconisées diffèrent, mais tout le monde est d’accord pour reconnaître l’importance de l’entrepreneuriat pour redonner de la croissance à notre pays. C’est pour cela que ‘entrepreneuriat a été encouragé par tous les gouvernements successifs, de droite comme de gauche, ces dernières années. Mais si l’on veut vraiment encoura er l’entrepreneuriat, il faut comprendre comment La classe politique française, principalement Issue de l’administration, le connait très mal.
Quant à la population, elle perçoit l’entrepreneuriat, et les entrepreneurs, aux travers de mythes qui ont la vie dure : l’entrepreneur est un héros, ou un escroc, un visionnaire, un individu charismatique, un lutteur seul contre tous, un chanceux, etc. La réalité de l’entrepreneuriat est beaucoup plus prosaïque, comme pourrait ous le dire n’importe quel entrepreneur. Il n’en reste pas moins que même ceux qui sont au falt de cette réalité ne savent pas vraiment comment les entrepreneurs pensent et prennent leurs décisions.
Ce n’est sûrement pas en lisant les mémoires d’entrepreneurs qu’on en apprend plus : toujours écrites par ceux qui ont réussi, elles font inévitablement apparaitre cette réussite comme le résu tat naturel du talent de son auteur. Écrites longtemps après les faits, elles tendent à occulter les échecs initiaux, la part de hasard et les approximations de toute démarche entrepreneuriale. 1 Surtout, elles ‘expliquent pas pourquoi d’autres entrepreneurs, ayant eu une approche similaire, et parfois tout aussi talentueux, n’ont pas connu la même réussite, et pas donc écrit leurs mémoires.
Il y a dlX ans, une jeune chercheuse indienne émigrée aux États- Unis, elle-même ancienne entrepreneuse, a décidé de reprendre tout à zéro et de comprendre vraiment comment les entrepreneurs raisonnent et agissent. Élève dHerbert Simon, prix Nob protocole. Elle choisit plusieurs entrepreneurs ayant connu chacun une réussite indéniable. Elle leur soumet des problèmes typiques que rencontrent des entrepreneurs, et leur emande de réfléchir ? haute voix lorsqu’ils les résolvent.
Elle met en lumière cinq principes que ces entrepreneurs appliquent systématiquement, sans en être nécessairement conscients. Ces cinq principes que nous détaillons plus bas forment la base de ce qu’elle va appeler l’Effectuation, la logique entrepreneuriale des entrepreneurs experts. Quelques exceptions notables existent, comme l’ouvrage « Comment j’ai foiré ma startup écrit par Nicolas Riou en 2001 (Éditions d’Organisation) ou plus récemment « Grandeurs et misères des stars du Net » écrit par Capucine Graby et Marc Simoncini (Grasset) en 012. Les travaux de Sarasvathy ouvrent une période nouvelle, post- mythique en quelque sorte, où nous pouvons parler de l’entrepreneuriat tel qu’il est, non tel qu’an se le représente, tel qu’on aimerait qu’il soit ou même tel que les entrepreneurs nous le décrivent. Cet ouvrage a donc pour but de vous présenter l’effectuation, ses principes et ses fondements. Beaucoup de choses ont déjà été écrites sur l’Effectuation, mais la plupart sont en anglais et mps de proposer une bien sûr les entrepreneurs eux-mêmes, mais également les accompagnateurs et coaches, les investisseurs et les étudiants.
Il ‘adresse également aux chercheurs en entrepreneuriat qui souhaitent disposer d’une introduction à ces concepts. J’ai découvert l’effectuation en 2004. J’étais alors entrepreneurs et j’étais très frustré, et même un peu inquiet, de constater que les ouvrages que je lisais sur l’entrepreneuriat ne correspondaient pas du tout à la pratique que j’en avais. Il me fallait être visionnaire, je ne Pétais pas. Il me fallait avolr un plan précis, j’avançais en tâtonnant. Il me fallait lever de l’argent, personne ne voulait m’en donner et d’ailleurs, je n’étais pas sûr que c’était ce qui me fallait.
Et puis je uis tombé sur l’article fondateur de Sarasvathy2 et je me suis dit « c’est moi, c’est ce que je fais ». J’étais en quelque sort le Monsieur Jourdain de l’Effectuation. J’a constaté plus tard que beaucoup d’entrepreneurs à qui je parle de l’effectuation sont dans le même cas, et s’y retrouvent immédiatement ; ils se sentent soulagés que leur approche émergente, progressive, tâtonnante, non seulement soit justifiée par la recherche de Sarasvathy, mais aussi soit celle de nombreux « grands » entrepreneurs qui ont réussi avant eux.
Cet ouvrage vous invite donc à votre tour à découvrir une autre approche u processus entrepreneurial. Le processus entrepreneurial : théorie et réalité Le processus entrepreneurial est énéralement schématisé en deux phases : une première phase dite « d’exploration » avant la création au cours de laquelle l’entrepreneur découvre une opportunité d’affaire et définit son offre (couple produitmarché), suivie, une fois l’entreprise créée, d’une seconde phase de mise en œuvre au cours de laquelle le couple produit marché correspondant ? l’opportunité est exploité pour produire de la richesse.
Ce processus type est représenté dans la Figure Sarasvathy, S. D. 2001. Causation and effectuation: toward a theoretical shift from economic inevitability to entrepreneurial contingency. Academy of Management Review, 26: 243-263. 8 Figure 1. Processus entrepreneurial théorique : une vision délibérée Cette distinction entre phase préalable de découverte et d’élaboration, d’une part, et phase ultérieure de mise en œuvre d’autre part correspond à une approche qualifiée de ‘délibérée’ par les chercheurs Mintzberg et Waters3.
Dans cette approche, seule la première phase est innovante. C’est durant cette phase qu’est découverte l’opportunité, que le prodult est conçu et que les segments hoisis ainsi que l’approche de marché sont définis. Le couple produit-marché sur lequel la firme se lance n’est pas censé chan er durant la seconde phase, celle de la mise en œuvre de ses boîtes alimentaires en plastique.
Dans l’approche délibérée, c’est sur la capacité à identifier le bon couple produitmarché que se fonde en grande partie la réussite de la startup. Celle-ci tient dès lors ? la qualité de la prédiction qui est faite du marché potentiel, à celle de la planification des actions pour entrer sur ce marché, et à la capacité de l’entreprise à suivre précisément les étapes ainsi planifiées.
L’approche délibérée du développement de la startup peut donc être résumée ainsi une équipe entrepreneuriale découvre une opportunité Slgnificative, conçoit une offre correspondante, crée une firme, lève éventuellement des fonds sur la base d’objectifs clairs, recrute une équipe et assemble des ressources, développe le produit et le commercialise, permettant le décollage et passant en croissance rapide des revenus et de la taille de l’organisation.
En substance, cette approche correspond à un modèle d’Innovation binaire « à un coup Le développement de firmes comme Compaq (cf encadré), Lotus u Netscape, dans l’informatique, ou de Tupperware dans le domaine de la grande consommation, correspondent à cette approche : le produit envisagé à la création a rapidement rencontré une clientèle et l’entreprise s’est bâtie de manière durable sur ce couple produit-marché.
Voir Particle « Of strategy, deliberate and emergent » Henry Mintzberg and James A. W Créée en 1986 par des managers expérimentés de Texas Instruments, financée par des investisseurs à hauteur de 20 millions de dollars, une somme considérable pour l’époque, l’entreprise termine son premier exercice avec un hiffre d’affaire de 100 millions de dollars, un résultat extraordinaire.
Compaq présente ? l’extrême tous les ingrédients d’une mise en œuvre idéale du modèle délibéré vitesse, planification soignée, investissement massif pour une concentration de force maximale, exécution pure après la phase de création, aucune incertitude quant aux aspects-clés de la stratégie, détermination correcte des produits et marchés dès le premier jour, croissance fulgurante du chiffre d’affaire, etc. (Source : Amar Bidhé) L’approche délibérée correspond à une approche « risque élevé / retour élevé ‘est-à-dire qu’elle constitue un pari.
Si le couple produit-marché identifié avant la création est un succès, l’entreprise a « vu juste » et peut décoller et croitre rapidement. Sinon, sa disparition est probable. Figure 2. Vision délibérée : un modèle entrepreneurial « à un coup Or dans un contexte de marché nouveau (innovation de rupture), difficilement identifiable du premier coup, et un engagement trop fort et trop précoce envers un couple produit-marché augmente le risque d’échec de l’entreprise • il limite la flexibilité de celle-ci ui devient particulièrement sensible aux chaneements PAGF 19