LIVRE BLANC SUR LE FINANCEMENT DE LA TRANSITION ECOLOGIQUE Mobiliser les financements privés vers la transition écologique Direction générale du Trésor Commissariat général au développement durable Sous la supervision de Dominique Dron, ingénieure générale des Mines org. et avec le concours d h Sni* to View général du Trésor novembre 2013 Rapporteurs Direction générale du trésor Robin Edme Conseiller Finance responsable auprès du Chef de service de l’économie, de l’évaluation et de l’intégration du développement durable Emmanuel Massé Iler du Directeur Dominique Dron, ingénieure générale des Mines, avec l’appui de
M Thierry Francq. Le Livre Blanc s’appuie sur des rapports nationaux et internationaux (parmi lesquels ceux de l’OCDE, de [‘AIE, du Conseil économique pour le développement durable, du Commissariat général ? la stratégie et à la prospective, de Louis Gallois, de Roger Guesnerie, de Gérard de la Martinière, dEurogroup Institute, de Karine Berger et Dominique Lefebvre, et de Pierre Duquesne), sur des auditions et la consultation d’un panel d’experts en 2012, ainsi que sur les conclusions d’une première conférence organisée le 12 juillet 201 2 au ministère de l’économie et des finances.
Introduction La transition écologique désigne la nécessité pour nos économies de rendre leur évolution compatible avec les ressources finies de la planète et le maintien des régulations naturelles indispensables à la vie telles que le climat ou le fonctionnement des écosystèmes. Elle recouvre tout processus de transformation de l’économie visant à maintenir ces ressources et régulations en-deçà de seuils critiques pour la viabilité de nos sociétés.
Elle suppose donc non seulement un découplage entre la croissance économique et les prélèvements, en quantité et ualité, sur le capital naturel (habitats, ressources et régulations physiques, chimiques et blologiques), mais également l’adaptation du rythme de leurs utilisations à notre capacité à entretenir ces régulations et renouveler ces ressources.
Envisagée comme la transformation des normes de production, de consommation et d’inv PAGF OF recouvre une palette d’enjeux macro-économiques et sectoriels, premier chef desquels ceux relevant de la stabilité du climat, de la préservation des écosystèmes et de l’utilisation durable des ressources (matières premières, eau, sols, déchets). Enfin, elle se situe dans le cadre d’un développement durable au sens que donnent à ce terme les traités internationaux 1/2. Aussi se doit-elle de prendre en compte les enjeux sociaux et sociétaux liés à cette nécessaire transformation de nos économies.
La transition écologique suppose des investissements importants pour les quarante années à venir, et qui seront d’autant plus coûteux qu’ils seront différés. Ily a donc urgence à agir. De nombreux projets liés à la transition écologique sont par définition des projets longs (quinze à trente ans, voire au-delà) vec une composante risque fréquemment élevée (incertitudes quant au délai du retour sur investissement, aux stratégies technologiques gagnantes… et peuvent requérir selon les sujets une mise de fonds initiale importante. La problématique de son financement relève donc autant de celle du financement de long terme que des particularités liées à la préservation des ressources et régulations naturelles. Les Etats n’ont ni la vocation ni la capacité, à eux seuls, d’assurer financierement la transition écologique.
Il s’agit donc avant tout d’orienter les choix d’investissement, de consommation et ‘épargne des acteurs économiques (ménages et entreprises) dans un sens favorable à la préseNation UNDP, Green Economy in Action : Articles and Excerpts that Illustrate Green Economy and Sustainable Development Efforts, 2012; UNEP, PAGF 3 OF Sustainable Development and Poverty,2011 ; OECD , Green Growth Strategy, 2011 ; ainsi que le titre de la Partie Ill de la déclaration de Rio+20, Green economy in the context of sustainable development and poverty eradlcatlon. Rapport de la Commission mondiale sur l’environnement et le développement de l’ONU, présidée par Madame Gro Harlem Brundtland, Notre venir à tous, avril 1987. Livre blanc ‘Financement transition écologique’ 04-1 1-2013 de renvironnement par des signaux adaptés. Suite à la crise économique et financière, les épargnants et les investisseurs ont été conduits à réduire leur exposition dans les investissements risqués et longs.
Le renforcement, par ailleurs nécessalre, des règles prudentielles, pourrait accentuer ce biais3 dans les allocations d’actifs4. Cette situation est susceptible de freiner la mobilisation des financements nécessaires a la transition écologique, qui renvoie souvent à des investissements risqués de moyen et long terme. En autre de nombreux équipements arrivant en bout de cycle devront être renouvelés et ce de façon adaptée notamment aux enjeux de la transition écologique.
Cela ne signifie pas que tout financement long irait dans un sens favorable à la transition écologique, d’autres critères de gestion -notamment extra-financiers- et capacités d’analyse dans l’a réhension large et renouvelée des ri essaires pour s’en comportements des acteurs privés (ménages, entreprises et financiers) et publics vers cette adaptation des modes de production, de consommation et d’investissement est donc au cœur de ce Livre blanc.
Ces mécanismes doivent nécessairement refléter à la fois la diversité des besoins, d’acteurs et de modes d’organisation économique. La transition écologique implique une rénovation profonde de nos modes de pensée et nos comportements, une nouvelle révolution industrielle mais aussi intellectuelle6. Elle demande l’implication et l’adhésion de Pensemble des acteurs de la société, dont celles des citoyens7.
Elle peut nourrir le fondement d’une volonté de « (re)faire société s, c’est-à- dire de renforcer l’affectio societatis, facteur de résilience socio-économique tant au plan ational que local, notamment dans cette période charnière. Eurogroup Institute, Financer des sociétés résilientes, des territoires robustes, mai 2012. 4 IRRC Institute-Mercer, Investments horizons – Do managers do what they say 2010. Commission européenne, Livre vert sur le financement à long terme de féconomie européenne, COM(2013) 150 final, 25 mars 2013.
Kay J. , The Kay Review of IJ KE u’ Markets and Long-Term Decision Makine, Februarv PAGF s OF les échéancer Mettre en place des signaux de prix écologiques reflétant les enjeux de long terme Favoriser l’adaptabilité du tissu économique, et notamment des PME-ETI, à [‘évolution vers la transition écologique Deuxième principe • Compléter les outils existants par d’autres instruments ciblés pour mobiliser les financements publics et privés vers la transition écologique 4. 6.
Créer, dans le secteur du bâtiment, les conditions juridiques d’un partage amélioré public-privé des risques, facilitant les financements de la transition écologlque Favoriser la transition écologique grâce à une meilleure mobilisation des financements publics, notamment pour les PME-ETI Favoriser l’émergence d’instruments de financement alternatifs et e supports d’investissement dédiés au financement de la transition écologique de long terme, répondant à la diversité des besoins Relayer au niveau européen une approche ambltieuse de l’accompagnement de la transition Troisième principe : Renforcer la rise en compte des enjeux extra-financiers de la tran développement de l’ISR et des critères ESG vis-à-vis des citoyens et des relais d’opinion Inciter à une meilleure prise en compte des enjeux ESG dans la stratégie de développement compétitif des émetteurs Quatrième principe : Renouveler le cadre intellectuel des pratiques des acteurs autour des bjectifs et du financement de la transition écologique 12. 13. 14.
Enrichir, compléter, développer les systèmes d’information afin d’éclairer et de tracer la contribution des choix publics et privés à la transition écologique Accélérer l’appropriation par les acteurs financiers des enjeux et des outils relatifs au financement de la transition écologique Stimuler l’enseignement supérieur et la recherche académique opérationnelle, en favorisant la pluralité des approches, sur l’intégration des enjeux de la transition écologique dans les choix d’investissement des entreprises et des acteurs financiers OF travail. D’ici à 2050, les sociétés devront être capables de répondre à une demande de 9,3 milliards d’habitants (d’après le scénario médlan de la division « population » des Nations unies) et devront alors s’assurer de la disponibilité et du renouvellement équilibré de ces ressources tant aux niveaux local et national qu’européen et mondial.
Cela suppose des actions spécifiques, d’efficacité, de substitution et de préservation, alors que les impacts du changement climatique commencent à se faire sentir et que les ressources et régulations naturelles sont souvent déjà très tillsées et dégradées voire surexploitées. Il devient essentiel d’étendre la notion de capital au-delà du champ habituel du capital productif ou du capital humain pour tenir compte également du capital naturel. Cette prise de conscience est relativement récente8 alors même que les acteurs ont pu considerer comme inépuisables ou indéfiniment renouvelables certaines ressources pourtant menacées, sans, par conséquent, veiller à leur pérennlté. Faute de prise en compte du coût socio-économique de la perte de ces ressources et cycles naturels, leur pérennité n’est pas spontanément assurée. Ill. 1. En cas d’inaction, la mise à mal des régulations et ressources naturelles hypothèquera lourdement les conditions de vie et pourrait affecter également la croissance, avec une chronologie et une amplitude variables selon les pays De nombreux rapports internationaux ont déjà montré que l’évolution climatique induite par l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre, largement liées à l’utilisation des énergies fossiles, était susceptible de dé asser rapidement un seuil dangereux pour les écos PAGF ressources hydriques et biologiques dont dépendent étroitement es sociétés humaines. Les phénomènes climatiques extrêmes, l’acidification des océans, la montée du niveau des mers se font déjà sentir, avec pour certains des impacts économiques déj? sensibles (dégâts sur le patrimoine bâti, pertes de rendements agricoles, incendies, inondations, tempêtes, salinisation des sols, assèchements et risques physiques liés à la fonte accélérée des glaciers… ). Eviter les plus graves conséquences de ce dérèglement climatique9 suppose que les émissions mondiales atteignent un pic au plus tard en 2020.
Le rapport Stern estimait que le réchauffement climatique onduirait à l’équivalent d’une perte de consommation par habitant, définitive et irréversible, comprise entre 5% et 20% selon les scénarios et selon la prise en compte (ou non) des impacts non marchands au cours des deux prochains siècles par rapport à un scénario tendanciel (dit de croissance équilibrée). Les pertes d’espèces vivantes et la raréfaction des habitats naturels en bon état, sur terre et dans les mers, impactent non seulement les activités qui en dépendent localement, mais aussi la capacité de la biosphère à assurer certaines fonctions générales telles que la ollinisation, la fourniture d’eau douce, l’entretien des sols, le recyclage du carbone atmosphérique…
Le MEAIO a montré qu’environ 60% des 8 Lancement de la Natural Capital Initiative britannique en avril 2009, et de la Global Natural Capital Initiative en juin 2012 lors de Ri0+20 qui a lancé le Wealth Accounting and the Valuation of Ecosystem Services (WAVES) Programme, coordonné par la Banque mondiale, et rapport de la Commission Stiglitz-Sen-Fitoussi 2009) recommandant d’élargir les indicateurs de revenus non marchandes. (2009) recommandant d’élargir les indicateurs de revenus aux activités non marchandes. 9 Les récentes déclarations de N. Stern suggèrent qu’elles ont été fortement sous-estimées (http://ourworld. unu. edu/en/nicholas -worse/). 10 Millenium Ecosystem Assessment, Ecosystems and Human Well- Being. Synthesis, Washington DC, Ed. Island Press, 2005.
Livre blanc ‘Financement transltion écologique’ 6 services d’origine écosystémique sont en cours de « dégradation ou d’exploitation non rationnelle », dont l’eau douce, la pêche intensive, la purification de l’air et de l’eau, la régulation du climat aux échelles régionales et locales, les risques de catastrophe naturelle, et les parasites et qu’il est peu robable que la plupart des pressions directement responsables de ces évolutions connaissent une baisse d’intensité au cours de la première moitié du siècle, dans un contexte de multiplication du PNB mondial par 3 voire par 6 d’ici à 2050. L’étude TEEBI 1 menée ? l’échelle globale fait état, à l’horizon 2050, d’un risque de perte de des alres naturelles du fait de la conversion en terres agricoles, du développement des infrastructures et du changement climatique, et de des récifs coralliens (pêche intensive, pollution, maladies « blanchissement » des coraux lié au réchauffement de la pl