les problemes de la democratie grecque

TRAGEDIEET curre DES CLASSES DANS L’A I-IENESCLASSIQUE (A propos d’un ouvrage recent de V. Citti) Jaume Pértulas La tendance 1 souligner les liens entre la tragédie grecque et les institutions, les valeurs et les conflicts de la société ii qui elle s’adresse a beaucoup avancé, au cours de ces dernieres années. Cela semble ftre tres positif, mfme du point de vue stricte de la critique littéraire.

En effet, un concept rigide et pauvre de la condition humaine, c o n p e comme quelque cho tres souvent les spec cu personnages et aux s aca’. les réactions qui pou Néanmoins, le ait fait oublier que ent pas, face aux naturelles. ivre de Vittorio Citti’ nous a procur un certain malaise: il nuit 1 des voies de recherche qui seront dans doute tres fécondes encore, du fait qu’il en tire un bien malheureux part;.

Citti se révele partisan de l’école d’Engels dans sa version la moins nuancée -non pas par ses déclarations de principe mais certainement par ses développements2: les changements inherents 1 la disparition du communisme primitif et 2 la consolidation de la propriéte privée et d’une économie agraire auraient favorisé une idéologie fortement autoritaire, fondée sur la soumission de la femme et sur la gérontocratie. Il n’est pas question pour nous es valeurs de anciennes qui se veulent du matérialisme historique (question abordée d’una fason trop sommaire par CITTI 32 n. 3) sont spécialement lucides quelques unes des études réunies i Marxisrno e Societ2 antica, a cura di D. LANZA, e M. VEGEITl,MiIano, 1977. cette théorie (plut8t hAtive mais cohérente, en tout cas); ce qui nous frappe c’est le parti pris qui considtre la tragédie n’ayant d’autre fonction que celle d’ttre le porte-parole du systtme idéologique resultant d’une telle évolution, systtme qui se distingue par le fait d’ttre ccsingolarmente compatto e rigido, senza smagliatzlrea, et qui rganisait la société toute entitre d’accord avec un principe rigide de subordinations et de dépendances enchevttrées.

Qu’une thtse d’une si considerable portée exigerait une redéfinition du r81 e de la société grecque au sein de l’évolution historique générale du prochain Orient parait indlscutable; c’est p dire, il faudrait une version actualisée et plus scientifique de la frise imposante, bien qu’erronée dans certains aspects partiels, que G. Thomson situa P la base de son interprétation d’Eschyle3; il faudrait encore repenser les luttes sociales d’Athtnes, archalque et classique, sans oublier le cadre politique t religieux Oii le phénomtne complexe de la tragédie s’inserrait.

Mals, faire allusion P cette problématique dans un compte-rendu du livre de Citti devient arbitraire, par la raison suffisante que ces questions-ci y sont escamotées en bloc. lexité P propos de la 3 Je ne puis passer sous si PAGF 3 savants marxistes font parade P l’égard de THOMSON. Quant P CITTI, devient bien plus surG. cela prenant puisqu’il emploie un ton non pas de compréhension mais de vive louange i proEn pos d’auteurs plutdt équivoques, tels que MADDALENA DIANO. evanche, il est vrai que le vieil exégtte d’Eschyle fut l’adepte d’une orthodoxie ?troitement engelsienne, qu’il n’a pas pu tirer parti des Grundisse et qu’il a souvent appliqué au monde ancien la terminologie de la lutte des classes d’une fason grossiertment anachronique; mais il révele une sensibilité supérieure face aux valeurs ouvertes de lioeuvre littéraire. Ainsi, la production d’incarner des reves de l’ancien aristocrate athénien est sensée, par l’analyse de THOMSON, et des avenirs inconcevables par son créateur mime. Tel est le dangereux privilege des mots: ils se tournent est se révoltent.

Il ne s’agit seulement du fait que les générations successives leur donnent des sens ouveaux, les adaptent et les réinterprstent selon leur propre intérit -ce qui, la limite, ne nous épargne guPre une précision de leur fonction propre intéret -ce qui. P la limite, ne nous épargne guere une précision de leur fonction originale, P la lumiere de nos connaissances sur l’epoque de leurs créateurs; c’est plutdt qu’ils jouissent d’une versatilité, d’une ductilité radicales et qu’une critique rcontenutisticau se trouve spécialement mal équipée pour les cerner.

En outre, il est curieux de remarquer que le travail CITTls’est dévoloppé dans le sens d’un mécanicisme croissant; C —perd en ours de route l’habitude PAGF a 3 suistiquement les cours de route l’habitude de discuter casuistiquement les implications et les contextes des tirades qui l’intéressent. En effect, dans une premiere version d —chapitre i propos de Sophocle (nsofocle e le structure di potere nell’Atene del V secolon BIFG, 1976, pp. 84-120) notre A. remarquait, tout en dépistant les traces de la tension entre individu et rdle socialement impost, dans le fr. 83 P: n La testimonianza d’umanitü che esse ci rindono supera forse per interesse la documcntazione che gli stessi testi ci ofJFono Sulla oppressione e la lotta Lii classe* (p. 96 n. 27). Cette remarque a disparu du passage paralltle de son livre était (pp. 114-115),ce qui me semble un mauvais présage: si Cll-rl resté fidtle i ses points de vue initiaux, il n’aurait pas écrit ce livre avec les termes qui ont été finalement employés. Et, P propos des idéologies, il faudrait peut-Ctre parler de l’idéologie de liccétat de la questions, Citti en étant un partisan convaincu.

Puisque le probleme de la primauté des facteurs politiques sur les facteurs économiques dans le monde ancien (l’opposition entre homa politicus et homo economicus, pour employer des termes Weberiens4) est tres compliqué; puisqu’il est permis de oupsonner que la terminologie de la lutte de classes comporte une extrapolation abusive quand elle s’applique 2 l’esclavage ancien; puisqu’il est bien plus commode de s’épargner débat P propos de la distance infinie ui sépare les hero’ines du mythe et 3 que tous ces themes-li sont objet de discussion; il énumere honnetement et d’une fason raisonnablement exhaustive les études qu’il considere capitaux; il fait la synthese -quelquefoisdes positions en conflit, en distribuant des mentions d’honneur; il a, néanmoins, le soin d’emptcher que les problemes d’interprétation se mClent h l’ennuyeuse écopilation de passages juxtaposés d’une fason mécanique. Apres avoir franchi le seuil des questions conflictives -qui sont laissées de c6té par le foisonnement de la bibliographie, en emptchant qu’elles pénttrent la discussion des textes- ce livre devient quelque chose de tr b semblable au Flon2ge de Stobée; ce qui l’en distingue, en tout cas, c’est le contenu des —e p a ha – mais la technique d’accumulation n’est pas tres difféa, rente.

Alors, pour en arriver P démontrer que la tragédie grecque est le véhicule de propagande d’une société anti-égalitaire, qu’elle sertr surtout i ssurer aux privilégiés que leurs droits découlent de l’ordre naturel des choses (de l’ordre divin, enfin) Citti emploie ccil contenutismos, dans sa version la plus brutale, malgré les quelques déclarations qui visent le sens contraire et qui sont excellentes du point de vue méthodologique. 4 pour une discussion trb juste et brillante de cette problématique, cf. HUMPHREYS. SC. , aHomo politicus and Homo economicus: war and trade in the economy of archaic and classical Greeces dans Anthro alo and the Greeb, London, 1978. PAGF s 3 néanmoins i propos de la femme romaine: aThe Silent Women of

Romew dans Aspects ofAntiquity: Discoveries and Controversies, London, 19772, pp. 124-136. En ce qui concerne l’écartement entre les données mythiques et la sltuation réelle, POMMEROY, GOdderS. a. , ses, Whores andSlaves: Women in Classical Antiquity, New York, 1975, n’a pas de rétincence, en dépit du caractsre militant de son ouvrage, pour manifester ces raisonnables réserves: nRitengo anche necessariO evitare di tram conclusionisulle donne grecbe delperiodo classico daifimagine delle eroine del/’etli de/ bronzo offerta dalla tragediagreca [ … J Le tragedie non possono venire usate come fonte d’informazione utonoma Sulla vita delle donne in generea (p. X V de la tr. it.. Torino, 197).

Dommage que CllTl évité la forl mulation meme d’une problématique tellement complexe! Bref, il met P profit les mots des personnages, mais il oublie les situations Oii ils sont proférés, et les termes de leur caractérisation, et, encore plus, le développement dramatique tout entier6. Cette objection, vise des questions de méthode, est radicale et de principe, bien qu’elle n’implique pas nécessairement la disconformité avec ce que Citti essaie de défenser. Par exemple: ‘1 est bien possible que l’Ajax et le PhiioctZte oient une preuve d’adhésion de Sophocle aux points de vue des Edyevei— en ce qui concerne leur primauté naturelle sur la populace.

Mais une telle affirmation n’est pas du tout illustré par l’analyse des dites tragédies; Citti ne fait qu’une allusion sommaire aux contradictions et aux affrontements de I ienne et tout de suite PAGF 6 3 aux contradictions et aux affrontements de la société athénienne et tout de suite aprPs il les authentifie grice 2 un tas de cltations: des phrases que les personnages prononcent, sans aucun égard du moment Oii ils les disent, devant qui, avec quel obje 7. Ainsi le caractcre dialectique des oeuvres est éprisé. 6 Ce qui résulte exasperant c’est que C I —semble avoir été conscient. un certain mol ment, des réserves et des critiques auxquelles sa facon de travailler offrait le flanc. En effet, dans la premitre version du chapitre sur Sophocle (vid. supra n. ) il remarquait avec justesse ceci: #Perquesto si dovri tener conto delle particolari situazioni drammatiche e sceniche, come &punto di vistapraprio di ognipersonaggior (p. 87). Belle manifestation de principes dont on ne peut pas dire qu’elle soit tenue en cours de route! D’autre part, c’est bien significatif que dans l’introduction du livre -qui n’est qu’une ersion remaniée de la partie initiale de l’article sur Sophocle- ces mots aient aussi disparu: on dirait que la dynamique particulitre dune recherche menée partir de tels postulats comporte un accroissement progressif de rigidité. 7 Néanmoins, C I —24 déclarait: *Una verifica di queste proposizioni sari spesso conl dotta nelllambito delfe vicende.

Le parok del/ ‘Aiacesofocleo sul valore della nobilta’ sono confemate non solo dalle parole d altri personaggi di questa e delle altre tragedie di Sofocle, ma sopratutto daiie vicende dell’eroe Che si uccideper essere coerente con l’immagine dellagrandena d’animo che ‘propria della sua stirper. Mais, si la premitre partie du programme -sur les mots- est t 7 3 d’animo che e’propria della sua stirper. Mais, si la premitre partie du programme -sur les mots- est tout fait accomplie (cf pp. 102-107), je ne vois absolument pas que cela soit vrai aussi pour la deuxitme partie -celle qui concerne les nvicendew. En ce sens. il est utile d’évoquer les termes dont LLOYD JONES. Thejustice of Zeus, Berkeley, 1971 , et plus récemment WICKERS, Towards Greek Tragedy, London. 973, se sont servis pour bllmer le procédé qui veut tracer l’évolution historique de la pensée grecque partir de l’analyse de uelques mots clé; procédé qui ne tient compte que des paroles et qui oublie les processus et les actions. Cette tendance ne pas considérer le contexte -en termes de sujet, de personnages et de thématique, quand il s’agit d’une oeuvre littéraire- résulte souvent curieux et irritant I la fois: Cest impossible différer d’oplnion avec LLOYD JONES quand il écrit: nThe investigation wiii not be complete unti! the study of moral teminology has been supplemented by a study of the actions pe7formedin the book or the society in question andthe attitudes shown toward them by those who haveperfomed and those who have described themr ( o p it. 3). est vrai que personne ne pourrait inculper C I d’isoler la littérature de son contexte social, I la facon d’un SNELL bien d’un ADKINS; mais la méthode qui met en situation de priviltge, au sein de l’oeuvre artistique, détriment des zesta est PAGF 33 les personnages formulent des vérités ultimes ou qu’ils s’identifient tout bonnement avec les avis du potte; au contralre, les paroles de chacun sont modifiées, qualifiées par leurs contradicteurs, par la situation, par les alternatives du drame et last but not least par une conscience éveillée de l’ambigüité des affaires humains, conscience qui, chez Euripide, atteint une ormulation programatique (cf:fr. 189 N2, appartenant P l’Antiope: naurdc au ric npayparoc S iuuGv X&-WV a y J v a Oeir’ au, ei xpy—iv uopéc) ; mais qui n’est pas du tout un point de vue étranger P ses prédécesseurs.

En outre -et cela est peut- plus grave-, a complttement oublié l’élément ironique -la distance entre les mots et les intentions, entre ce que les personnages disent et la sltuation réelle- bref, un élément fondamental du thé9tre des grecs, bien son sens et sa portée soient si différents chez chacun des tragiques8. Le manque de ductilité de Citti se manifeste catégoriquement ans l’image trop usée et conventionnelle qu’il nous offre de l’évolution de la tragédie. Dans la premitre version de son étude sur Sophocle (vid Citti affirmait sur un ton de défi: al’analisi storico sociale non eila notte in cui tutte le vacche sono nere: in una cornice culturale comune, anzi justifient cette déclaration: ce qui nous est présenté comme du nouveau n’est qu’une version bon marché de 1 ‘Eschyle de Thomson, le Sophocle de Maddalena et 1 ‘Eurpide de Di Benedettoy.

La flgure la moins favorisée par cette vision de la tragédie qui se prétend évolutive et sans contredit celle de Soph-cle’-. ‘a pas l’air tout P fait raisonna8 On peut dire que C — Iplace ici dans une perspective symétriquement opposée i cese Ile des critiques -WICKERS. exemple- qui, en train de définir le cadre social du théSpar tre grec, font une allusion programatique i nthat confiontation With the rupture in human relationshzps which is the specialproperty of the tragedy to creater (o p cit. 119). 9 Je crains que l’étude de V. DI BENEDETTO. Eunpide: Teatro e Societa’, Torino, 197j2, tres brillante en certains aspects (cf: le compte-rendu en BIEH X, 1976, pp. 5-86) ne devienne, en Italie au rnoins une nouvelle rthodoxie un peu, disons, orthopédique. C’est, par exemple, la partie consacrée i Euripide dans la monumentale Storza e Civilta’dei G e R. , ce qui ci, dirigée par BIANCHI-BANDINEL—I. m’en donne ie soup$on. (Le chapitre sur la tragédie, écrit par DEGANI. rkSoit le titre général de aDemocrazia atemese e swluppo politicoo, et apparait dans le vol. 2 , t. 3, pp. 292-310). 10 Des phrases cornrne nul culmine delsistema, gli d2i ne sono garanti: lafede profonda nef loro agire misteriosa e provvidenziafe sopprime tutte le contradzzioniw laissent de cBté la plupart des études les 33 s sur Sophocle, des