EXTRAIT ALLEGORIE

CAIlégorie alchimique dans la loge symbolique du R. E. A. A. Le cabinet de réflexion La première épreuve, celle de la terre, se vit donc en silence dans le cabinet de réflexion ; le temps y est suspendu, les initiés y éprouvent un choc, une rupture. Le récipiendaire dest au préalable dépouillé de ses métaux, marquant par là son détachement de tout bien matériel, de toute convention, de toutes les habitudes et de toutes les valeurs du monde profane. Les métaux symbolisent les Ténèbres, il faut donc les abandonner pour pouvoir entreprendre la quête vers la umière.

Débarrassé édiger son testame OF libération de soi, ce h n, i , Svp next page le préparant ainsi à r et plus féconde. Le t endaire doit mier essai de e intérieure era plus riche rappelle que nous n’emportons rien dans la mort et qu’après nous être dépouillé de nos métaux il ne reste plus rien à léguer… sauf nous-même. e cabinet de réflexion est la nox profunda des alchimistes, il symbolise la caverne, la grotte, la matrice, l’athanor, l’ouverture vers le monde chthonien.

Le récipiendaire y entre par la porte étroite qui donne accès à l’œuf primordial, l’œuf philosophique des alchi107 L’Allégorie alchimique dans la loge symbolique du R. E. A. A. mistes, c’est-à-dire au chaos qui vit en lui : le réservoir de toutes les possibilités de son existence. Le cabinet de réflexion est étroit, les murs sont noirs. Le noir, c’est le monde souterrain, le ventre de la terre où régénération du monde, la couleur de la substance universelle et de la materia prima ; elle annonce le commencement de [‘Œuvre alchimique : l’Œuvre au noir.

Dans cette obscurité des origines, la seule source de lumière est une bougie dont la flamme est vacillante. II ne faut pas aveugler les yeux, car ils ne peuvent supporter ‘éclat d’une lumière qui risque de démasquer brutalement l’intérieur de l’être. La faible lueur révèle doucement le postulant à lui-même dans un secret et un silence hermétiques qui permettent d’écouter le plus profond de sa conscience. Dans l’obscurité du cabinet de réflexion, la bougie pourrait être verte, car le vert symbolise l’espérance de vie, la résurrection.

Le scarabée égyptien, emblème de l’éternité et des renaissances, signifiait aussi, quand il était vert, la régénération nécessaire pour naître à la vie spirituelle. Sur une petite table, sont posés un crâne, un verre d’eau, u pain. 108 L’Allégorle alchimique dans la loge symbolique du R. E. A. A. Le crâne évoque la mort bien sûr, il rappelle que nous sommes poussière et que nous retournerons en poussière, mais le crâne est aussi le réceptacle de la pensée, la matrice de la connaissance.

Le crâne figure le caput mortuum des alchimistes, c’est-à-dire le résidu terreux et insipide de leurs expériences dont on ne peut plus rien tirer après en avoir extrait le Soufre et le Mercure. C’est la tête silencieuse, vidée de ses réflexions. L’eau sans laquelle aucune vie n’est possible est ici de ure nature spirituelle, elle est le dissolvant universel, « la menstrue qui contient la semence des choses »6. Cest le Mercure des philosophes, appelé aussi 20F 14 Mercure des philosophes, appelé aussi rosee céleste.

L’eau rappelle ainsi la dissolution alchimique. Le pain qui a acquis une dimension symbolique essentielle figure le sacré, il évoque le « fi xe » alchimique. Associé au blé, il évoque la vie ; combiné au levain, il symbolise la transformation spirituelle du récipiendaire. Sur un tableau noir se détachent en couleur argentée un coq, un sablier, une faux, les symboles du Soufre et du Sel et ept lettres : V. I. T. R. I. O. L 6. Antoine-Joseph Pernety, Dictionnaire mytho-hermétique, Bauche, Paris, 1758, p. 292. 09 La couleur argentée des inscriptions symbolise la pureté et Ihumilité indispensable au postulant pour se régénérer. Le sablier symbolise le temps, le temps initiatique, une sorte de quatrième dimension où le temps profane est suspendu, figé, entre Midi et Minuit, heures symboliques du travail maçonnique. D’un point de vue ésotérique, le sablier prend une signification qui transcende la vision purement matérialiste que l’on donne habituellement à ce symbole. Le sable s’écoule entement d’une ampoule à l’autre par un conduit étranglé, la porte étroite par où s’écoule le temps.

Le sablier peut être retourné ; il enseigne ainsi que nous pouvons inverser notre mode de réflexion, notre façon d’agir. Le sablier symbolise la possibilité d’un autre choix, il évoque la transformation, la naissance d’une nouvelle vie. Le sablier est aussi un attribut de Saturne, dieu de la fin et du début, associé au Plomb alchimique. Dans le cabinet de réflexion, le Plomb, ma 30F 14 de réflexion, le Plomb, matérialisé par le sablier, invite le postulant à changer ses métaux vils en Or, à réaliser la utréfaction alchimique.

Si le sablier est représenté avec des ailes de chauve-souris, il rappelle que le Mercure volatil est né de la putréfaction. e coq annonce l’aube nouvelle, c’est-à-dire la naissance de l’impétrant qui va triompher des Ténèbres. un 110 ‘Allégorie alchimique dans la loge symbolique du R. E. AA. phylactère est associé au coq, il porte les mots « Vigilance et Persévérance » ; cette maxime rappelle au récipiendaire qu’il doit être attentif et pouvoir aller plus loin, au-delà des apparences. Le mot phylactère vient du grec phulactérion : antidote.

Cet antidote invite à être attentif, à continuer la démarche sans se décourager. La pugnacité, la vigueur du coq symbolisent le triomphe de l’intelligence sur nos instincts. Le coq est présent dans de nombreuses traditions, il est l’attribut d’Hermès, l’oiseau d’Esculape, il est présent dans la mythologie chinoise et dans le christianisme. Symbole solaire universel, le coq représente aussi le Mercure alchimique7, principe femelle hermétique porteur des propriétés passives de la materia prima, la semence fertilisante de tous les métaux, l’énergie intérieure, humaine et spirituelle.

Le principe mâle est le Soufre, symbole de FEsprit, évoquant les propriétés actives. Il représente l’énergie extérieure, naturelle et divine de la materia prima. Le Soufre, associé au Feu, féconde le Mercure, associé à l’Eau. De leur union naît le Sel régénérateur. Le Sel est le principe neutre, l’équilibre 4 4 associé à l’Eau. De leur l’équilibre vers lequel nous devons tendre afin de pouvoir nous régénérer. 7. Le mercure est symbolisé par un croissant de lune sur un cercle et posé sur une croix (p. 91 ‘Allégorie alchimique dans la loge symbolique du R. E. A. A.

Dans certains cabinets de réflexion, le Sel est matérialisé sur la table par du « sel de cuisine » disposé dans une coupe, parfois nous trouvons aussi du soufre. Il s’agit là malheureusement de représentations « profanes Le Soufre et Sel sont des principes alchimiques, non des substances chimiques. Le Soufre est figuré, à gauche du coq, par un triangle posé sur une croix (voir p. 91). Le Sel alchimique est symbolisé, à droite du coq, par un cercle ou soleil divisé en deux par le diamètre (voir p. 91) ; il est l’image parfaite de l’équilibre, car il résulte de l’union du Soufre et du Mercure.

Le Sel alchimique est l’harmonie vers laquelle il faut tendre, l’esprit vital qui unit la conscience au corps et qui permet la découverte, la naissance de notre substance régénératrice. Pour les hermétistes, ces trois principes, Soufre, Mercure, Sel, composaient la matière de PŒuvre ; ils se retrouvaient ainsi dans tous les corps. Ils forment, sur le tableau noir du cabinet de réflexion, le triangle philosophique, symbole de l’équilibre en toute chose. La faux symbolise bien sûr la mort, mais elle est aussi un régulateur, car elle égalise tout sur son chemin, ce qui permet au nouveau grain de ermer.

Symboliquement, elle fauche une vie illusoire et un nouveau cycle 4 fauche une vie illusoire et donne accès à un nouveau cycle 112 de vie. La faux, attribut de Saturne, symbole astrologique du Plomb alchimique est la base la plus humble d’où puisse émaner une évolution ascendante. Cinscription V. I. T. R. I. O. L. est une énigme Indéchiffrable pour le profane, mais inconsciemment, il peut en percevoir la valeur alchimique et sentir qu’il y a là quelque chose d’indescriptible qui va le mener à l’éveil.

En franc-maçonnerie, tout est symbole et, au premier regard, les sept lettres V. I. T. R. I. O. L. euvent faire penser à l’acide sulfurique… Mais ici, chaque lettre est suivie d’un point… Il faut donc aller voir au-delà des apparences. Le franc-maçon ne sait ni lire ni écrire, il ne sait qu’épeler : V. I. T. R. I. O. L. Cette formule hermétique véhicule un enseignement ésotérique : Visita interiora terrae rectificandoque invenles occultum lapidem Visite l’intérieur de la terre et en rectifiant tu découvriras la pierre cachée. V. I. T. R. I. O.

L est une invitation à mourir symboliquement, alchimiquement, afin de se préparer à une vie nouvelle et à réaliser la première opération de l’Œuvre 13 hermétique. À cette formule sont parfois ajoutées les lettres IJ et M pour exprimer V. I. T. R. I. O. LLJ. M. , les lettres IJ. M. signifiant VERAM MEDICINAM la vraie médecine). 8 Cinitiation au premier dep nt adopté la 6 4 celle de la francmaçonnerie, sauve de l’oubli les idées de valeurs rejetées par le christianisme pontifical comme hérétiques. Toute la richesse de la pensée antique non chrétienne se retrouve dans l’alchimie.

L’alchimie est totalisante. Elle est aussi libérante. Elle permit, sans avoir trop l’air d’y toucher et sous des oripeaux chrétiens, d’échapper u monopole philosophique et religieux de l’orthodoxie romaine sans pour autant nier la générosité du message christique. L’alchimie a joué un rôle important dans la libération de la pensée. Elle permet le dépassement des modes, des époques, des cultures qui divisent les hommes. Elle ajoute à l’impératif de connaissance celui de la sagesse. Et cette sagesse est sans frontières. Elle est universelle. Les voyages L’initiation est une purification, elle comporte plusieurs épreuves indispensables pour se régénérer, renaître et se 8. Les lettres U et V ont le même graphisme en latin. 9. Freddy de Greef, op. it. , p. 32. 114 dépasser. Ce sont les épreuves de la Terre, de l’Ar, de l’Eau et du Feu ; il s’agit là des quatre éléments alchimiques, non des composants concrets dont ils portent les noms. La théorie des quatre éléments10 est présente dans de nombreuses traditions très anciennes, comme en Grèce au vie siècle avant notre ère, et fait aussi partie de la tradition alchimique.

En franc-maçonnerie, les épreuves de la Terre, de l’Air, de FEau et du Feu que subissent les récipiendaires lors de la cérémonie d’initiation, reproduisent les quatre opérations du Grand Œuvre alchimi Lie, les quatre purifications ui se rapport reproduisent les quatre opérations du Grand Œuvre alchimique, les quatre purifications qui se rapportent aux quatre éléments ; elles aident l’impétrant à se débarrasser de ses préjugés, de ses fausses valeurs. La première épreuve de purification est la putréfaction de la materia prima, elle s’effectue dans le cabinet de réflexion, c’est l’épreuve de la Terre.

Le récipiendaire poursuit sa purification dans le temple, il franchit la porte basse, celle qui permet de quitter la vie profane pour s’engager dans la voie initiatique, celle qui mène à l’être essentiel. Le premier voyage est aussi une épreuve de purification, c’est Pépreuve de l’Air, le récipiendaire traverse un souffle de vie. L’Air est le support de la volatilité, le mental peut 10. La théorie des quatre éléments place le Feu et [‘Eau, l’Air et la Terre au centre d’un système de correspondances symboliques. 15 ainsi passer de la terre au ciel, symbole de la spiritualité. ‘épreuve de l’Air figure la sublimation de la partie volatile de la materia prima : la pierre doit être dépoussiérée avant de pouvoir être travaillée. Le deuxième voyage est l’épreuve de l’Eau. L’Eau n’est as ici, comme on l’imagine trop souvent, l’eau commune qui s’écoule du robinet, mais bien l’Eau1 1 des alchimistes, c’est à-dire le Mercure philosophique, principe femelle présent dans tous les corps, la quintessence coagulée des éléments. L’épreuve de FEau est la dissolution du Mercure qui est en nous.

Il faut dissoudre les imperfections de l’être afin de pouvoir renaître, il faut laver les souillures de la Pierre brute ava B4 afin de pouvoir renaitre, il faut laver les souillures de la Pierre brute avant de la tailler. Le troisième voyage est l’épreuve du Feu. Les métamorphoses de ‘être, les transmutations des métaux vils en or ne peuvent se faire que grâce au Feu purificateur. Ce n’est pas le feu « profane » mais le Feu alchimique, celui qui détruit et purifie, qui consume et régénère, qui brûle et éclaire, qui permet de changer d’état.

La spiritualisation de l’être se réalise par le Feu. 11. L’alchimiste Pernety, dans son Dictionnaire mytho- hermétique, précise ainsi pas moins de 74 adjectifs qualifiant le Mercure. Nous avons ainsi, l’Eau arsenicale, rEau céleste, l’Eau d’amour, l’Eau de chasteté, l’Eau de nitre, l’Eaude-vie des Sages, l’Eau divine, l’Eau rouge, . 16 Pour Carl Gustav Jung, père de la psychologie des profondeurs, le Grand Œuvre préfigure le chemin de développement de Pâme humaine au sein des mondes de matière, ainsi, l’Œuvre alchimique est inséparable de la propre transmutation de l’opérant.

L’alchimie est une discipline de travail intérieur, dextraction et de sublimation des trois principes Mercure, Soufre et Sel pour les réunir à nouveau, mais purifiés. Calchimiste et le franc-maçon deviennent ainsi eux-mêmes cette Pierre philosophale permettant de devenir « de l’Or », symbole de l’esprit accompli. Le Sceau de Salomon Le pentacle résumant la symbolique des quatre éléments est l’étoile à six branches : le Sceau de Salomon.

Cet hexagramme ornant les murs ou le sol de certains temples est formé de deux triangles é i totalisent les certains temples est formé de deux triangles équilatéraux qui totalisent les quatre éléments hermétiques. Le Sceau de Salomon résume donc rensemble des éléments de l’univers. Selon la tradition hermétique, il inclut les sept métaux alchimiques et les sept planètes correspondantes, il symbolise la sagesse, la Pierre philosophale. 117 Sceau de Salomon 12 entouré des serpents formant [‘Ouroboros. Le serpent ailé figure le volatil, l’esprit universel.

Le serpent d’en bas symbolise le fi Xe, la materia prlma. 12. AJ. Kircheweger, Aurea catena Homeri Oder eine Beschreibung von dem Ursprung der Natur und natürlichen Dingen, frankfurt und leipzig, 1723, p. 5. Bibliothèque électronique suisse, http://www. e-rara. ch/cgj/content/ titleinfo/1 190973 118 Du Petit Œuvre au Grand Œuvre Un des aspects évocateurs du travail alchimique et maçonnique est de passer des Ténèbres à la Lumière. En ce sens, les mutations successives de l’Œuvre sont symboliquement contenu is couleurs : noir, blanc, 4