Université de Neuchâtel Jilin 2010 Simon Miaz Temple 9 2052 Fontainemelon 032. 853. 15. 15. L’Atlas de la mémoir Table des matières Memoire Miaz Premium By IulieRoxi14 (beepaTIR 15, 2015 17 q pages CAtIas de la mémoire dans rœuvre de Georges Perec Mémoire de master présenté par Simon Miaz sous la direction de Muriel Pic Institut de littérature française Faculté des lettres et sciences humaines p g 79 es Perec 71 $ 32 4432 / ‘ -k 81 , -OWO 7AA! 7A@! LOH/32&31 2)//’1 -k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k-k 7A8!
L’Atlas de la mémoire dans l’œuvre de Georges Perec ntroduction Je suis né le samedi 7 mars 1936, vers neuf heures du soir, dans une maternité sise 19, rue de l’Atlas, à Paris, 19e arrondissement. 1 C’est par cette énumération précise des informations sur le lieu et la date de sa naissance que Georges Perec commence le sixième chapitre de son autobiographie, W ou 2 79 goût particulier pour respace et la représentation de celui-ci : « J’aime : les cartes et les plans, les atlas « 4.
En effet, que ce soit dans Espèces d’espaces, qu’il publie en 1974, dans La VIe mode d’emploi, en 1978, ou dans d’autres de ses textes, il ressort clairement que l’espace, le lieu, leur perception et leur eprésentation fascinent Georges Perec : on trouve régulièrement dans son œuvre des atlas, des cartes, des plans, des portulans, des planisphères, des mappemondes, des globes terrestres, des cadastres, des guides de voyage, des explorateurs, des cartographes, des géographes, des ethnologues, etc.
De plus, l’Oulipo (Ouvroir de Littérature potentielle), qu’il rejoint en 1967, publie en 1981 son second recueil de travaux qu’il intitule : Atlas de littérature potentielle. Cobjectif de l’Oulipo est d’étendre les explorations littéraires, de repousser les limites de la création littéraire en imposant des contraintes qui oueront le rôle de stimulateur d’imagination. Ainsi, le groupe se réunit régulièrement depuis 1960 pour discuter les propositions de contraintes : les unes redécouvertes dans des œuvres anciennes et réactualisées ; les autres complètement nouvelles, inspirées, par exemple, de structures mathématiques.
L’Atlas de littérature potentielle est donc voué à exposer au grand public les différentes explorations et découvertes de l’Oulipo. De ce fait, l’ouvrage rassemble les travaux oulipiens et les présente comme les cartes d’un atlas géographique. 3 179 originale : Denoël, 1975), p. 35. 2 Perec, Georges, « Je suis né », in : Je suis né 9-14, p. 9. 3 Ibidem. 4 , pans, seuil, 1990, pp. Perec, Georges, « J’aime, je n’aime pas. Pour continuer la série », in : L’Arc 76, 1979, repris dans • Pingaud, Bernard [et al. , Georges Perec, Paris, Inculte, 2005, pp. 107-109, pp. 107-108. Le terme atlas, que l’on retrouve à plusieurs reprises dans l’œuvre de Georges Perec et qui a été choisi pour titre de l’ouvrage oulipien, est un mot très riche en significations. Est-il nécessaire de préciser, tout d’abord, qu’il s’agit du nom du Titan Atlas, condamné par Zeus à porter sur ses épaules, selon les ersions, le monde, la voûte du ciel, le haut pilier qui sépare le ciel de la terre. ar analogie, le massif montagneux du nord de l’Afrique, l’Atlas, tient son nom du Titan. Du personnage mythologique, souvent représenté avec un globe terrestre sur les épaules, fut également tiré le nom du recueil de cartes géographiques du cartographe flamand Gerardus Mercator à la fin du XVIe siècle, intitulé qui, dès lors, se perpétua pour désigner les recueils de cartes en général (géographiques, célestes s, par exemple). Outre 179 d’étoiles porte le nom d’Atlas, et qui est situé dans la constellation du Taureau.
Enfin, selon le Timée et le Critias de Platon, Atlas serait également le nom du premier roi de l’Atlantide, Ille qui aurait été engloutie dans des temps reculés. L’atlas fait référence au monde, à des représentations du monde, qu’il s’agisse du globe terrestre que porte le Titan ou des cartes rassemblées par un faiseur d’atlas. Il est donc question de cartographie, de lecture et d’écriture du monde et de sa mise en espace. Ensuite, le globe que porte Atlas, qui rappelle l’objet globe terrestre que l’on peut avoir chez soi, représente symboliquement la totalité, le savoir total, encyclopédique.
Enfin, ‘atlas, comme livre géographique, propose une vision très complète du monde : « Catlas est un dispositif qui permet de concilier le tout et le détail »5. En effet, contrairement au planisphère et au globe terrestre, l’atlas présente, par la profusion des cartes qu’il contient, le monde dun point de vue aussi bien global que resserré autour d’un espace précis. Il y a, dans l’atlas, tout un mode combinatoire, toute une disposition des cartes qui lui permet d’embrasser la totalité macroscopique et microscopique et d’atteindre une certaine exhaustivité.
Le terme d’atlas, comme nous avons pu le voir, est d’une richesse mpressionnante et son emploi par l’Oulipo le rend dautant plus intéressant. En lisant les œuvres de Georges Perec, nous avons remarqué de nombreuses occurrences d’atlas. Cette 5 Jacob, Christian, L’Empire S 79 roche théorique de la l’histoire, Paris, Albin Michel, 1992, p. 97. notion, que nous avons précisée plus haut, nous semble assez juste pour aborder son œuvre dans une perspective inédite.
Il existe, certes, une abondance de références d’ouvrages critiques sur les différents textes de Georges Perec ; cependant, fatlas n’a, apparemment, pas encore été abordé contrairement à des thèmes comme le puzzle ; les euls articles abordant explicitement les cartes et la cartographie chez Georges Perec sont, à notre connaissance, celui de Jean-Luc Joly, « L’écriture cartographique de Georges Perec »6, et celui d’Andrée Chauvin, « Cartes et plans représentations de l’espace et conditions de lecture »7, qui traitent tous deux uniquement de La Vie mode d’emploi.
Ainsi, l’atlas, qui ouvre des perspectives critiques plus étendues que la seule carte, permet, nous semble-t-il, d’échapper ou de contourner les difficultés que pose une œuvre très glosée.
En ce qui concerne le choix du corpus dans la large bibliographie erecqulenne, nous avons décidé de nous concentrer principalement sur trois des œuvres les plus connues de Georges Perec, La Vie mode d’emploi, W ou le souvenir d’enfance et La Disparition, parce qu’elles présentent le plus grand nombre d’occurrences d’atlas, ains ou certains articles repris dans le recueil fictif Penser/Classer (principalement « Les Lieux d’une ruse et « Lire : esquisse socio-physiologique b).
Ajouter une nouvelle entrée critique dans la glose déjà abondante des œuvres de Georges Perec pourrait paraître assez futile ou redondant. Cependant, croyons-nous, la erspective qu’offre l’atlas permettra, d’une part, de saisir plusieurs aspects déterminants de son œuvre et ce, de manière originale ; et, d’autre part, de dégager un nouvel enjeu de son écriture. En effet, nous tâcherons de montrer comment l’atlas cristallise une manière de lire, de déchiffrer le monde chez Georges Perec, posant ainsi la question de la visibilité.
Catlas va, pour commencer, nous conduire à une première partie qui s’intéressera à la démarche d’exploration et de cartographie de la mémoire. La mémoire devient un lieu à explorer, un lieu inconnu, une carte blanche ou une absence sur les cartes de Joly, Jean-Luc, « L’écriture cartographique de Georges Perec in : Garane, Jeanne (éd. ), Discursive geographies. Writing Space and Place in French, Amsterdam/New York, R0dopi, 2005, pp. 223-236. 7 Chauvin, Andrée, « Cartes et plans : représentations de l’espace et conditions de lecture », in : Chassay, Jean-François (dir. , Cahiers Georges Perec n•8, Colloque de Montréal, Bordeaux. Castor astral, 2004, pp. 237-253. 3 79 explicite dans W ou le souvenir d’enfance. Nous tâcherons donc de montrer comment, sous la plume de Georges Perec, la mémoire prend les caractéristiques d’un lieu ; puis comment les recherches émorielles s’apparentent ? une exploration de terrain, qui aboutit à une cartographie du lieu mémoire. Dans une deuxième partie, nous nous intéresserons à ratlas du savoir, l’atlas d’un point de vue encyclopédique.
Si, d’une part, la mémoire est reconnue défaillante, s’ily a des trous de mémoire, d’autre part, il y a une volonté de tout savoir. Par conséquent, nous tâcherons d’aborder la pratique de l’inventaire, démarche oulipienne adoptée dans l’Atlas de littérature potentielle. En effet, la littérature devient, pour l’Oulipo, un lieu, un espace d’exploration, certes contenu par les contraintes, mais vaste dans a libération de l’imagination. L’Oulipo inventorie les contraintes qu’il découvre et son Atlas devient un outil, comme l’est le dictionnaire.
Nous observerons également la pratique perecquienne de l’énumération (la liste, l’index, etc. ), qui constitue aussi bien une tentative d’approcher l’exhaustivité qu’un procédé mémoriel. Enfin, dans un troisième temps, nous aborderons l’atlas sous l’angle de l’écriture et de la lecture : l’atlas entre lisibilité et visibilité. En effet, l’atlas met en évidence une façon de lire le monde qui s’appuie sur la visibilité, entre les quelques images qui arsèment les œuvres de Georges Perec et les appels constants ? des typographies divergentes, à des éléments détonnant.
Nous nous intéresserons à la simultanéité, qui 8 79 s’articule aussi bien dans La Vie mode d’emploi, où il est question d’un immeuble dont la façade est enlevée et dont toutes les pièces sont, de ce fait, visibles au même instant, que dans La Disparition, où est abordée la question de FAIeph, point fixe qui permet de contempler simultanément la totalité de l’univers dans une nouvelle de Borges.
Pour explorer la simultanéité, l’instant, Georges Perec propose un mode de lecture – articulièrement développé dans son article Lire : esquisse socio-physiologique » – qui s’apparente à celui de l’atlas et qu’il va non seulement employer pour déchiffrer la réalité, mais également mettre en pratique dans ses livres pour inciter le lecteur à adopter cette façon de lire.
Nous verrons alors que ces modes d’écriture et de lecture permettent de lire la mémoire comme un atlas Mnémosyne, à la manière de celui d’Aby Warburg, où des éléments significatifs se créent dans les intervalles formés par le montage des deux textes de W ou le souvenir d’enfance, l’un fictif, l’autre autobiographique. L’Atlas de la mémoire dans Vœuvre de Georges Perec La thématique de l’atlas, à travers ce parcours, nous permettra de mettre en lumière, chez Georges Perec, une stratégie de lecture et d’écriture du monde, et en particulier de la mémoire, par le recours de l’écrivain à un principe de visibilité. 179 inextricablement enchevêtrés, comme si aucun des deux ne pouvait exister seul, comme si de leur rencontre seule, de cette lumière lointaine qu’ils jettent l’un sur l’autre, pouvait se révéler ce qui n’est Jamais tout à fait dit dans l’un, jamais tout à fait dit dans l’autre, mais seulement dans leur fragile intersection. B En 1975, Georges Perec présente une autobiographie tout à fait particulière, W ou le souvenir d’enfance, qui mêle une fiction inspirée par une histoire créée pendant sa jeunesse et un récit autobiographique.
L’ouvrage commence par un récit en caractères italiques dont le narrateur est un certain Gaspard Winckler qui se présente comme le « seul dépositaire, la seule mémoire vivante, le seul vestige de ce monde »9 qu’est une île nommée W, située dans la erre de Feu, au large du Chili. Cette ile, nous apprend-il, a été engloutie et ses habitants ont tous disparu. Ce narrateur est décidé à raconter ce qui l’a ené sur ces lieux et ce qu’il y a vu.
Le deuxième chapitre donne la parole à un narrateur qui se nomme Georges Perec et qui entame son récit par cette assertion : « Je n’ai pas de souvenirs d’enfance »10. Les deux textes jetant l’un sur l’autre une « lumière lointaine »1 1, les propos qui y sont tenus sont, de ce fait, à la fois très proches et à la fois passablement divergents. La mise en parallèle de ces deux chapitres, comme nous sommes invités à le faire par le texte inscrit sur le quatrième de couverture du livre, nous révèle plusieurs éléments importants qui oint de départ à notre ,19