CHAPITRE : LA POLICE ADMINISTRATIVE La police est un des types d’action de l’administration : l’activité destinée à maintenir l’ordre public dans la société. Il s’agit d’une des missions de souveraineté les plus essentielles de l’État. La sauvegarde de l’ordre public est un objectif de valeur constitutionnelle (p. ex.
CC, 12 mai 2010, Loi relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne), que les pouvoirs publics peuvent invoquer pour limiter certaines libertés publiques, comme la liberté de communication (CC, 10 mars 2011, Loi d’orientation et de rogrammation pour LOPPS12 : dispositif p de communication a pornographiques rep La loi qualifie le main or 52 curlté intérieure – accès aux services t des images me un « ‘droit fondamental » des citoyens et un devoir de l’Etat (loi du 29 août 2002).
La CJUE reconnait que les États « restent seuls compétents pour le maintien de l’ordre public et la sauvegarde de la sécurité intérieure » (9 déc. 1997, Comm. c/ France).
Le Conseil d’Etat a précisé qu’« en application de principes de valeur constitutionnelle selon lesquels la défense de l’ordre public t la protection des libertés, notamment la liberté individuelle et la liberté d’aller et venir, relèvent des seules autorités nationales, un acte de police, dès lors qu’il implique l’usage de la contrainte et qu’il est susceptible de conduire à une privation de liberté, ressortit à l’exercice des conditions essentielles de la souveraineté natio nationale, lequel n’appartient qu’à l’État.
Un acte de police ne peut donc, en principe, être exécuté que par une autorité publique française ou sous son contrôle » (avis, 28 sept. 2006). l/ La notion de police administrative – POLICE ADMINISTRATIVE ET SERVICE PUBLIC La police est un service public au sens organique et matériel : le service de la police exerce une mission d’intérêt général, et il existe un service de la police composé d’un ensemble de personnels spécialisés. Police administrative et service public n’en sont pour autant pas confondus.
Ils se différencient dans leurs buts : l’ordre public visé par la police est plus étroit que l’intérêt général recherché par le service public. Ils sont distincts dans leurs procédés : la police prescrit et ne fournit pas de prestations ; elles-ci sont du domaine du sepu’ice public. Ils s’opposent dans leurs effets : la mesure de police limite les libertés publiques, l’intervention du service public tend à faciliter l’exercice des droits et libertés des citoyens.
Note : a rigueur de la distinction initiale entre police administrative et seNice public a parfois tendance à s’estomper. Deux illustrations peuvent en témoigner. En premier lieu, si la jurisprudence se réfère toujours principalement au but d’ordre public de la police administrative, il lui arrive de s’appuyer sur l’intérêt général seul pour reconnaître le bien-fondé d’une mesure e police (8 déc. 1972, Ville de Dieppe).
En deuxième lieu, la mesure de police peut constituer à la fois une réglementation et une prestation : le signal limltant la vitesse pour les automobilistes à l’abord d’un virage dangereux constitue une interdiction mais aussi fournit une prestation en signala OF virage dangereux constitue une interdiction mais aussi fournit une prestation en signalant le danger imminent. Police et service public peuvent ainsi apparaître imbriqués (5 déc. 1984, Ville de Versailles c/ Mme Lopez de Arias : respect du prlncipe de gratuité u service public pour une opération de police administrative).
La police est donc un service public particulier chargé d’édicter des prescriptions en vue de la protection de l’ordre public et d’en assurer le respect. Les infractions aux obligations édictées par les décrets et arrêtés de police sont dès lors pénalement sanctionnées (art. R 610-5 C. pén. ). 2- POLICE ADMINISTRATIVE ET POUVOIR REGLEMENTAIRE Police administrative et pouvoir réglementaire sont fréquemment assimilés pour deux raisons. D’une part, les autorités qui détiennent le pouvoir de police disposent aussi en général du ouvoir réglementaire.
D’autre part, les prescriptions de police s’expriment le plus souvent par la voie de règlements. Police administrative et pouvoir réglementaire sont cependant distincts. La police est un type d’action de l’administration, le pouvoir reglementaire est un moyen juridique utilisé aussi bien pour la police que pour le service public. Toutes les mesures de police n’ont pas un caractère réglementaire ; elles peuvent être individuelles. Le règlement de police, à la différence des autres règlements, peut porter atteinte à des libertés publiques dans la esure des strictes nécessités de l’ordre public. Sect. , 25 juill. 1975, Sieur Chaigneau). 3 – L’ACTION ET LE PERSONNEL La police en tant qu’action administrative doit être distinguée du personnel de police désigné par le même terme, la police. La notion de police administrative se caractér personnel de police désigné par le même terme, la police. La notion de police administrative se caractérise par la prise d’actes administratifs – réglementaires ou individuels – et des mesures nécessaires pour en assurer le respect. Les autorités de police sont celles qui ont le pouvoir de prendre des mesures de police.
Le personnel de police veille à l’application de ces mesures. Autorité de police et personnel de police sont donc distincts. La police administrative en tant que mode d’action peut se d’finir comme l’action par laquelle l’administration réglemente et surveille l’activité des particuliers en vu de protéger l’ordre publique. Il /Les buts de la police administrative 1 -LES BUTS ORDINAIRES La police administrative a pour but traditionnel la prévention des atteintes à l’ordre public.
Celui-ci repose sur trois éléments constitutifs classiques : La tranquillité, c’est-à-dire tout ce qui concourt au calme des itoyens, La sécurité, c’est-à-dire ce qui se rapporte à la protection de la population contre les risques et les calamités, La salubrité est une forme particulière de sécurité qui consiste à prendre toutes les propres à prévenir les risques de maladie ou de pollution. Le conseil d’Etat a rajouté plus récemment une quatrième composante, la sauvegarde de la d’gnité de la personne humaine. 2 -L’EXTENSION DE LA NOTION D’ORDRE PUBLIC Comme le remarque justement M.
Bernard (La notion d’ordre public en droit administratlf) une définition toute négative de ‘ordre qui se réaliserait exclusivement par l’absence de troubles… est une notion foncièrement » libérale » mais qui ne peut tout de même satisfaire pleinement le besoin naturel de paix, ni répondre aux exigenc peut tout de même satisfaire pleinement le besoin naturel de paix, ni répondre aux exigences des hommes du XXe siècle qui ont pu, à maintes reprises, amèrement constater que l’absence de troubles ne s’identifie que rarement à l’état de paix, ou, en définitive, à l’ordre « .
L’ordre public doit s’envisager comme une notion dynamique. All_e problème de l’ordre moral Dans les démocraties libérales, l’ordre public est l’ordre matériel et extérieur. Le premier but de la police administrative reste de prévenir et de maintenir l’ordre public. L’ordre moral n’est intégré dans le contrôle du juge que s’il coïncide avec le maintien de l’ordre public. Le désordre des consciences ne concerne l’autorité de police que lorsqu’il trouble la vie publique.
Note : Il est cependant parfois délicat de délimiter la frontière entre le péché individuel et ‘hérésie collective. La matière des films illustre ces difficultés. Le juge reconnait au maire le pouvoir ‘interdire la projection de films qui seraient » susceptibles d’entrainer,’ des troubles sérieux ou d’être à raison du caractère immoral desdits films et de circonstances locales préjudiciables ? l’ordre public » (Sect. , 18 déc. 1959, Société » Les fllms Lutétia » et autres ; 26 juill. 985, Ville d’Aix-en-Provence). Cest pour protéger la sauvegarde de la dignité humaine que le juge administratif a reconnu la validité de l’interdiction des spectacles scandaleux de lancers de nains. Il avait tout d’abord été juge que cette activité pouvait, » en cas de circonstances ocales particulières être interdite, le juge se refusant dans un premier temps de se prononcer sur le caractère immoral ou non de l’actlvité (TA Versailles, 25 févr. 1992, Soc.
Fun productions et w PAGF s OF caractère immoral ou non de l’activité (TA Versailles, 25 févr. 1992, Soc. Fun Productions et Wachenein). Le Conseil d’État, dans deux arrêts d’Assemblée rendus à l’occasion de ce » spectacle de curiosité a eu l’occasion d’affirmer de façon explicite que le respect de la dignité de la personne humaine constitue une des composantes de l’ordre public (Ass. , 27 oct. 1 995, Commune de Morsang-surorge; Ass. , 27 oct. 1995, Ville d’Aix-en-Provence).
Le Conseil constitutionnel avait déjà eu l’occasion de consacrer » la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d’asservissement et de dégradation » comme principe ? valeur constitutionnelle (CC, 27 juill. 1994, Bioéthique ; CC, 13 mars 2003, loi sur la sécurité intérieure). Désormais, le pouvoir de police générale du maire peut s’exercer dans ce domaine en l’absence de nécessités particulières tenant aux circonstances locales. our le Conseil d’État, c’est bien par sa nature, même que ette activité porte atteinte à l’ordre public. Cette jurisprudence a été confirmée dans le domaine du relèvement de restes humains (26 nov. 2008, Synd. Mixte Vallée de l’Oise, Commune de Fresnières, Communauté de communes du pays des sources). Le Conseil d’État refuse donc de consacrer explicitement la moralité publique (notion difficile à cerner) comme quatrième composante de l’ordre public.
Il peut lier la tranquillité à la protection des mineurs, afin de considérer l’interdiction par un maire de l’ouverture d’un sex-shop légale (ord. 8 juin 2005, Commune de Houilles). Le Conseil d’État a précisé que » le fait de montrer à l’écran une scène attentatoire à la dignité humaine, ne constitue pas en soi une atteinte au principe à valeur constitutionnelle d 6 OF la dignité humaine, ne constitue pas en soi une atteinte au principe à valeur constitutionnelle de la dignité humaine » (4 févr. 004, Association Promouvoir ; déjà Sect. , 30 juin 2000, Association promouvoir et époux Mazaudier et autres). Pour la Cour de cassation, le placement d’un étranger accompagné de son enfant mineur en bas âge dans un centre de rétention administrative démuni d’espace aménagé pour es familles ne constitue pas, en soi, un traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (Civ. ILe, 10 déc. 009, Préfet d’Ille-et-Vilaine). B ‘La protection contre soi-même Une mesure de police peut-elle être édictée dans un but de protection de l’individu cantre lui-même ? A priori, la réponse apparaît négative dans la mesure où une telle réglementation ne répond pas à la présentation de l’ordre public. Cette question est apparue avec l’imposition du port de la einture de sécurité pour les conducteurs et passagers des véhicules automobiles ou encore du port du casque pour les utilisateurs de véhicules à deux roues.
La jurisprudence a reconnu la légalité de l’interdiction car si celle- ci touche directement l’individu, elle tend aussi à accroître la sécurité et pour la société à pour la société à réduire le coût des prestations sociales qu’engendrent les accidents de la circulation (4 juin 1975, Bouvet de La Maisonneuve ; Ass. , 22 janv. 1982, Auto défense ; 8 déc. 1 996, Meyet). On assiste ainsi à une extension de l’ordre public dans la mesure ù » la réduction des consequences des accldents de la route ‘ constitue un but d’ordre public.
C ‘La continuité du service Le Tribunal des conf 7 OF la route » constitue un but d’ordre public. Le Tribunal des conflits a jugé que le préfet dispose d’un pouvoir de réquisition des personnels de soins pour assurer la continuité des soins, perturbée par le refus des médecins libéraux d’assurer les gardes de nuit et de fins de semaine même sans texte (ce pouvoir ne lui a été confié que par une loi postérieure à l’espèce, du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure).
L’existence d’un ouvoir de réquisition paraît donc « le corollaire naturel des pouvoirs de police » (TC, 26 juin 2006, Ru). Dans le même ordre d’idées, le Conseil d’Etat a jugé qu’un préfet peut légalement réquisitionner des salariés en grève de dépôts pétroliers dont l’activité présente une importance particulière pour le maintien de l’activité économique, la satisfaction des besoins essentiels de la population ou le fonctionnement des sen,’ices publics, lorsque les perturbations résultant de la grève créent une menace pour l’ordre public.
La mesure doit être imposée par l’urgence et proportionnée (réquisition d’une artie seulement du personnel) aux nécessités de l’ordre public (absence d’autres solutions immédiatement disponibles et aussi efficaces) : ord, 27 octobre 2010, Fédération nationale des industries chimiques CGT et autres. 3/ Police administrative et police judiciaire En schématisant, la police administrative est préventive alors que la police judiciaire est répressive.
Selon l’article 14 du Code de procédure pénale, la police judiciaire est chargée « de constater les infractions à la loi pénale, d’en rassembler les preuves et d’en rechercher les auteurs tant qu’une information n’est pas ouverte. Lorsqu’une information est ouverte, elle exécute 8 OF auteurs tant qu’une information n’est pas ouverte.
Lorsqu’une information est ouverte, elle exécute les délégations des juridictions d’instruction et défère à leurs réquisitions Tandis que la police judiciaire tend à rechercher et arrêter les délinquants pour les remettre à la justice, la police administrative consiste à prendre les mesures de contrôle et de prévention de tout trouble à l’ordre public (par ex. , 13 oct. 1982, Berrandou intervention des forces de police pour mettre fin à des désordres imminents dans une salle de bal).
Note : Pour effectuer la distinction entre police judiciaire et police administrative le juge, rend en considération la nature de l’activité (Sect. , 11 mai 1951, Consorts Baud ; TC, 7, tln 1951, Dame Noualek) et l’intention véritable de l’agent (TC, 15 janv. 1968, Préfet de la Haute-Garonne c/ CA de Toulouse – Cts Tayeb , TC, 10 mars 1997, Bourg). Dans cette optique, et concernant la police de la circulation, la suspension administrative du permis de conduite consécutive à certaines infractions est bien une mesure de police administrative.
Elle ne doit pas être considérée comme une anctlon, mais comme une mesure préventive destinée ? empêcher le conducteur de commettre de, nouvelles infractions (3 nov. 1989, Blanquie). Le critère de l’intention de l’auteur de la mesure rend difficile la distinction ; il faut apprécier en quelle qualité il a entendu agir. Il en résulte qu’une opération de police administrative peut, à tout moment, se transformer en opération de police judiciaire (Cass. rim, 5 janv. 1973, Friedel ; 19 mai 1982, Volbrecht). La distinction est d’autant plus relative que les autorités et le personnel sont souvent communs. L’agent de police exerce PAGF g OF relative que les autorités et le personnel sont souvent communs. L’agent de police exerce une mission de police administrative quand il règle la circulation, une mission de police judiciaire Io squ’il dresse procès-verbal.
Le préfet est autorité de police administrative quand il ordonne la saisie de journaux pour éviter toute atteinte à l’ordre ; il est autorité de police judiciaire lorsque la saisie a pour but la constatation de crimes ou délits et la mise ? la disposition de la justice de leurs auteurs. La distinction s’avère aussi délicate en ce qui concerne les ontrôles, les vérifications d’identité sur la voie publique . opération de police judiciaire dans le cas de recherche d’auteurs d’infraction précise ; opération de police administrative s’il s’agit de maintenir l’ordre public.
Or, la légls ation, en ce domalne, s’est développée en cherchant un compromis entre deux exigences concurrentes, ayant valeur constitutionnelles : la sauvegarde de l’ordre public, et la liberté individuelle. Ainsi, une réserve d’interprétation du Conseil constitutionnel impose que tout contrôle soit justifié par des » circonstances particulières ?tablissant le risque d’atteinte à l’ordre public » (CC, 5 août 1993).
Sont censurés les » contrôles d’identité généralisés et discrétionnaires » comme incompatibles avec le respect de la liberté individuelle. De fait, la égislation tend à fragiliser la frontière peiinettant de distinguer, dans le domaine des contrôles d’identité, la police administrative de la police judiciaire. La question est d’importance, l’opération de police administrative ne se faisant pas à l’initiative et sous le contrôle d’un juge. Le Conseil constitutionnel confirme donc qu’il appartient au législate