Victor hugo et l’europe

Chapitre : La prétendue responsabilité historique de la France dans la construction européenne Mensonge • « Victor Hugo nous a montré la voie de l’avenir en prophétisant les États-Unis d’Europe. » Résumé du dossier À partir de quelques d’ouverture du Cong 0 p g de son discours Paris en 1849, et sorties de leur contexte, Victor Hugo a été érigé u statut de prophète par les européistes en quête de crédibilité et de soutien. un jour viendra où vous, France, vous Russie, vous Italie, vous Angleterre, vous Allemagne, vous toutes, nations du continent, sans perdre vos qualités distinctes et votre glorieuse individualité, vous vous fondrez étroitement dans une unité supérieure, et vous constituerez la fraternité européenne, absolument comme la Normandie, la Bretagne, la Bourgogne, la Lorraine, l’Alsace, se sont fondues dans la France.

Un jour viendra où il ny aura plus d’autres champs de bataille que les marchés s’ouvrant au commerce et les esprits rts, leurs génies, défrichant le globe, colonisant les déserts, améliorant la création sous le regard du Créateur » 1/13 Sa renommée constitue un vecteur idéal pour toucher un très large public et Victor Hugo devient ainsi l’alibi de bon nombre d’hommes politiques de tous bords, comme Jack Lang, Lionel Jospin et Jacques Chirac, qui n’hésitent pas à citer Phomme de lettres sans même connaître le sens réel et global de sa pensée.

Jean-Baptiste Duroselle a ouvert le bal dans son ouvrage L’Europe, histoire des ses peuples ; les partisans de la construction européenne y sélectionnent olontairement les deux phrases les plus politiquement correctes, gommant toute trace de la portée religieuse et colonialiste du propos de Victor Hugo. En effet, le texte Intégral du discours est rempli de références l’Évangile, à la Providence et Dieu mais aussi aux vertus de la colonisation, ce que les européistes se gardent bien d’évoquer.

Avec le recul apporté par I’Histoire, force est de constater que le XIXe siècle ne sera pas le théâtre de l’union des peuples européens que souhaitait Victor Hugo, ce qui jette d’autant plus le discrédit sur la prophétie de l’homme de lettres et surtout sur l’exploitation qui n est faite aujou d’hui. 1.

La propagande Mensonge • « Victor Hugo nous a montré la voie de l’avenir avec sa prophétie sur les États-Unis d’Europe » 20 prescripteur » ou « du leader d’opinion Victor Hugo ayant prononcé, lors d’un ‘Congrès de la paix’ en 1849, un discours où il appelait de ses VŒUX la création des « États-Unis d’Europe », la propagande européiste a perçu l’intérêt de récupérer cette formule à son profit, fût-ce en tronquant complètement la pensée du poète.

Et cela d’autant plus que les sondages indiquent que Victor Hugo reste de nos jours l’un des écrivains les lus connus et appréciés des Français L’année 2002, proclamée « année Victor Hugo » à l’occasion du bicentenaire de la naissance du poète, a ainsi été ponctuée de très nombreuses cérémonies mettant l’accent sur ses prétendues qualités de « visionnaire européen Quel est le public spécialement Visé ?

Compte-tenu de la renommée de Victor Hugo, c’est une propagande tout public. Cependant, les personnes âgées et les milieux intellectuels sont peut-être un peu plus réceptifs 2/13 l’évocation de notre poète fétiche du XIXe siècle.

L’étude des textes de Victor Hugo peut aussi être un xcellent moyen de viser le public scolaire des enfants et adolescents pour les sensibiliser à la « nécessité de faire l’Europe Exemples-types de cette propagande « Les textes de Victor Hugo sont d’une actualité brûlante, qu’il parle du droit des enfants et de leur droit à l’instruction, du droit des femmes, de la nécessité de faire l’Europe (Dépêche AFP du 7 janvier 2002) « [Victor Hugo a développé une] vision prophétique des États-Unis d’Europe. Le message de paix et d’unité que nous a laissé Victor Hugo doit continuer d’inspirer le projet européen.

Pour que l’Union européenne, sans rien perdre de son mbition, s’élargisse à d’autres pays. Tout en parachevant son unité, l’Europe doit offrir au monde un modèle, fondé sur la paix, la démocratie, la solidarité et le pluralisme. Un homme né il y a deux cents ans a su ouvrir ce chemin. A nous, aujourd’hui, de le poursuivre Lionel Jospin, Premier ministre, Ouest France, 18 février 2002 3/13 « Victor Hugo est bien le père spirituel de l’Union européenne » Jean François-Poncet, sénateur UDF, ancien ministre des affaires étrangères, dans son discours en hommage à Victor Hugo, le 20 février 2002 devant le Sénat. . Européistes de droite et de gauche, tous d’accord pour chanter les louanges de Victor Hugo et sa belle idée » des « Etats-lJnis d’Europe » Le 19 mars 2002, le Président de la République, Jacques Chirac, rendit à son tour hommage à Victor Hugo en prononçant un discours pour l’inauguration de l’exposition « Victor Hugo, l’homme océan » à la Bibliothèque nationale de France. Le chef de l’Etat mit notamment en exergue chez Victor Hugo « la belle et troublante idée de l’Europe 4/13 4 20 d’Europe » et en profitait pour faire la promotion de l’euro. Le 9 mars 2002, Raymond Forni, Président socialiste de

IAssemblée nationale, dans son discours pour la Cérémonie de clôture du concours sur « Les combats de Victor Hugo célébra « l’idéal de liberté qui inspira chacune des luttes [de Victor Hugo] en particulier pour « les Etats-Unis d’Europe 5/13 « La prédiction de Victor Hugo au Congrès de la paix de 1849 s’est réalisée : « un jour viendra où vous, France, vous Russie, vous Angleterre, vous Allemagne, vous vous fondrez étroitement dans une unité supérieure et vous constituerez la fraternité europeenne Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre, discours devant l’Assemblée Nationale, le 25 novembre 2003, our appeler les députés à voter le projet de loi autorisant la ratification du Traité d’Athènes. 3. Pourquoi est-ce un mensonge ? La citation exacte de Victor Hugo La citation de Victor Hugo qui est reprise dans tous les livres européistes et dans tous les discours politiques est toujours la même. Cest la suivante « Un jour viendra où vous, France, vous Russie, vous Italie, vous Angleterre, vous Allemagne, vous toutes, nations du continent, sans perdre vos qualités distinctes et votre glorieuse individualité, vous vous fondrez étroitement dans une unité supérieure, et vous onstituerez la fraternité européenne, absolument comme la Normandie, la Bretagne, la Bourgogne, la Lorraine, l’Alsace, se sont fondues dans la France.

Un iour vie s 0 les marchés s’ouvrant au commerce et les esprits s’ouvrant aux idées. [… l Un jour viendra où l’on verra ces deux groupes immenses, les États-Unis d’Amérique, les États-Unis d’Europe, placés en face l’un de l’autre, se tendant la main par-dessus les mers, échangeant leurs produits, leur commerce, leur industrie, leurs arts, leurs génies, défrichant le globe, colonisant les déserts, améliorant la création sous le regard du Créateur » (1). Ces deux phrases, a priori séduisantes, sont, par exemple, les seuls passages du discours de Victor Hugo cités par l’éminent historien Jean-Baptiste Duroselle dans son ouvrage L’Europe, histoire de ses peuples (2).

Il est vrai que ce livre, présenté comme « une initiative européenne » (3) avait pour ambition « la réalisation d’une idée toute simple : la publication, pour le large public, d’une histoire de l’Europe en un volume, histoire considérée dans une perspective européenne et non nationale, [dont on espère qu’elle] contribuera d’une façon ou d’une autre à une éflexion sur ravenir de l’Europe » Assorti de telles intentions, cet ouvrage, par ailleurs intéressant et bien documenté, ne pouvait donc sans doute pas faire autre chose que gommer, dans le choix de ses citations, les extraits qui posaient éventuellement problème. La comparaison des citations de nos politiciens avec le vrai discours de Victor Hugo dévoile toute l’ampleur des mensonges de la propagande européiste. /13 Or, pour analyser les méc 6 0 écriture de l’histoire fonctionnement de la propagande européiste, il est intéressant de partir à la recherche du texte d’origine de Victor Hugo pour onnaître l’intégralité de la pensée du prétendu « visionnaire » et mesurer l’éventuel parti pris que recèle la citation qui en est systématiquement et exclusivement extraite. Et cette lecture du texte intégral (reporté pour ressentiel dans l’encart en fin de document) réserve plusieurs surprises fort instructives. Si ron confronte le texte hugolien d’origine à la citation qui en est faite, que ce soit par l’éminent Duroselle ou par nos responsables politiques, on remarque tout d’abord un « caviardage » systématique.

Car lorsque Victor Hugo prophétise l’avènement des États-Unis ‘Europe et ses liens à venir avec les États-Unis d’Amérique, il précise immédiatement, dans la même phrase, que ces deux entités étatiques auront vocation à « combin[erl ensemble, pour en tirer le bien être de tous, ces deux forces infinies, la fraternité des hommes et la puissance de Dieu ! » L’omission de ce membre de phrase n’est pas fortuite car elle fait disparaître de la citation un élément central de la pensée du « visionnaire », que l’on retrouve par ailleurs tout au long de son discours : l’avènement des « États-Unis d’Europe » et de la paix niverselle ne peuvent être que le fruit du triomphe de la religion chrétienne. Pour Victor Hugo, les « États-Unis d’Europe » signifient d’abord le triomphe universel du christianisme sur la planète.

Pour Victor Hugo, cette perspective est absolument fondamentale dès le début puisqu’il commence son discours en invitant les participants à « tourner en quel commence son discours en invitant les participants à « tourner en quelque sorte le dernier et le plus auguste feuillet de l’Évangile, celui qui impose la paix aux enfants du même Dieu puis qu’il le poursuit en évoquant « ette pensée religieuse, la paix universelle, toutes les nations liées entre elles d’un lien commun, l’Évangile pour loi suprême b. Plus loin, le poète prend même des allures de prédicateur intégriste en affirmant que « la loi du monde n’est pas, et ne peut pas être distincte de la loi de Dieu ‘ensemble de nos responsables politiques contemporains, qui citent l’auteur des Misérables comme une ritournelle à l’appui de la construction européenne, passent aussi sous silence cet appel digne des Croisades. pour Victor Hugo, les « États-Unis d’Europe » marquent le coup d’envoi de la olonisation blanche de la planète. Ce n’est pas tout.

Car la seconde constatation qui s’impose à la lecture du discours d’origine de Victor Hugo, c’est que celui-ci ne fait nul mystère que l’objectif atteindre est non seulement la paix universelle (comprendre : entre pays européens et États-Unis) mais aussi d’« élargir sans cesse le groupe civilisé » et de « donner le bon exemple aux peuples encore barbares b. En clair, il s’agit d’élargir la Chrétienté à l’ensemble de l’univers, en invitant les puissances occidentales à développer partout un grand élan colonisateur : « Oui, la face du monde serait changée ! Au lieu de se déchirer entre soi, on se répandrait pacifiquement sur l’univers ! Au lieu de faire des révolutions, on ferait des colonies !

Au lieu d’apporter la barbarie à la civilisation, révolutions, on ferait des colonies ! Au lieu d’apporter la barbarie à la civilisation, on apporterait la civilisation à la barbarie ! Ainsi, « l’Asie serait rendue à la civilisation, l’Afrique serait rendue à l’homme Le poète « visionnaire » tant célébré par les politiciens et les publications européistes apparaît donc ans le même discours non seulement comme le chantre des « États-Unis d’Europe » mais comme le théoricien du grand mouvement de colonisation des puissances occidentales de la seconde partie du XIXe Siècle. 7/13 Quatre ans après ce discours de Victor Hugo, en 1853, Napoléon Ill donnera d’ailleurs instruction de coloniser la Nouvelle Calédonie.

Les années suivantes, l’Empereur décidera la fondation du port de Dakar, l’implantation du comptoir des Rivières du Sud en 1859, puis l’acquisition de la côte du Gabon en 1862, principales étapes de la pénétration française en Afrique de l’Ouest. N’est-ce pas conforme au souhait de Victor Hugo de « rendre l’Afrique à l’homme » ? En Asie, la France fera cause commune avec le Royaume-Uni pour mener des expéditions punitives européennes entre 1858 et 1860, se concluant par le sac du Palais d’Été, afin de forcer les Chinois embrasser la foi catholique d’une part, à acheter l’opium des Indes britanniques d’autre part (5). C’est sans doute ce que Victor Hugo appelle « rendre l’Asie à la civilisation » ?