Commentaire composé J’aime new York JP.Sartre

Habitué aux maisons des siècles passés, aux toits bas et à une architecture permettant les promenades à pied, il éprouva une certaine surprise devant les  » ensembles massifs « , les « grandes perspectives « , les « façades  » identiques à l’infini, les formes géométriques austères t monotones, enfin les rues dont la taille supprime toute intimité. est adapté Plusieurs expression p g progressivement :  » ‘ fois), « je me suis habi peu l’auteur a su évol de ce paysage. appris à aimer  » (2 évèle qu’à ‘i. Peu eautés particulières Le regard est important car il va plus loin qu’en Europe pour saisir les perspectives :  » mes regards ne s’attardent plus l’. Alors les gratte-ciel deviennent moins écrasants.

Le choix d’un point de vue élevé ou de la voiture comme moyen de découverte met en valeur la ville : ‘i New York ne se révèle qu’à une certaine hauteur, une certaine distance, à une certaine vitesse ‘l. Enfin la présence de la nature, sensible en Europe avec les arbres bordant les rues, Swipe to Wew next page les petits jardins ou les parcs, se révèle tout aussi réelle dans les villes américaines, mais dune manière différente. Pour s’adapter, il faut faire un effort.

Et cet effort est  » recompensé  » : la ville offre ses charmes à celui qui « sait regarder Maintenant Sartre la juge  » superbe et changeante  » Superbe ‘ signifie à la fois  » hautaine  » et  » admirable  » , tandis que ‘ changeante  » contraste l’uniformité lassante d’abord ressentie, omme l’indiquent les phrases  » en quête d’une maison qui, par impossible, ne serait pas identique aux autres maisons l’ et  » monotone quand on la parcourt à pied ‘ L’amour dont parle Sartre pour la ville ne fut pas un coup de foudre, pourtant l’amour ressenti n’en est pas moins grand, comme le montre l’anaphore du verbe « aimer » au début de trois paragraphes sur quatre:  » J’aime New York.

J’ai appris à l’aimer « , « j’ai appris à aimer son ciel  »  » j’ai appris à aimer les avenues Fort de cet amour, l’écrivain tentera de faire partager son enthousiasme à ses lecteurs restés en France, par une escription poétique de la VIIIe qui en retient les aspects les plus significatifs. Son exemple portera d’ailleurs ses fruits, car Albert Camus, alors dirigeant de Combat, et qui reçut des articles de son compatriote, écrira l’année suivante ses premières impressions devant New York:  » Le cœur tremble devant tant d’admirable inhumanité. Au premier regard, violente ville inhumaine. Mais je sais qu’on change d’avis. ‘ D 2 D’abord réticent, puis amoureux, J. -p. Sartre, en guide averti, voire en artiste, dirige nos regards dans une immensité qui resterait incompréhensible sans lui.

Sa description va démonter es préjugés sur New York, dont l’architecture est jugé lourde, écrasante et inhumaine. Sensible à l’élégance sobre des formes géométriques, il relève à la manière d’un peintre, dans le premier paragraphe, que les buildings  » ne sont plus rien que des volumes, plus rien que l’encadrement austère du ciel Leurs deux rangées forment  » de simples lignes harmonieuses « , horizontales et verticales. Le manque de couleur et de présence humaine donne l’impression d’un tableau en noir et blanc ou gris. Seule l’expression  » un lambeau de ciel flotte entre elles  » introduit un mouvement et peut-être une teinte plus vive.

Pourtant de cette risaille perdue « dans la brume  » se dégage une beauté fondée sur les formes légères et uniformes. L’avant-dernière phrase du texte résume de façon abrupte cette composition :  » Un ciel sauvage au-dessus de grands rails parallèles : voilà ce qu’est New York, avant tout ‘ es gratte-ciel ne produisent donc pas une impression désagréable par leur taille imposante, au contraire Sartre y trouve une esthétique séduisante qui influence sa psychologie. Il insiste en effet sur le sentiment de sécurité et de liberté qui s’en dégage, essentiellement grâc 3 insiste en effet sur le sentiment de sécurité et de liberté qui s’en égage, essentiellement grâce à la personnification du ciel, qui anime le paysage.

Si les buildings semblent  » perdus  » dans la brume, il ne ressent aucune angoisse, car le ciel ‘ monte la garde et veille sur la cité  » Cette  » protection  » est d’autant plus rassurante qu’elle semble universelle, s’étendant sur le pays mais aussi sur le  » monde entier Sartre ne fait-il pas ici allusion à la guerre ? Si Sartre s’est rendu aux États-Unis, c’est pour rendre compte de l’effort de guerre fourni par cette nation. Par ailleurs, il se souvient, comme le dit Simone de Beauvoir dans La Force des choses à propos de on voyage, que pour les Européens de 1945  » L’Amérique, c’était aussi la terre d’où nous était venue la délivrance ‘ Paradoxalement cette protection assure la liberté. Par un retournement, c’est le ciel d’Europe qui parait peser comme un couvercle sur les êtres.

Une métaphore prolonge la personnification du ciel gardien de l’univers, opposant l’animal ‘ apprivoisé  » mais inquiétant puisqu’il  » rampe « , ou du moins peu estimable, à l’espace  » solitaire et pur comme une bête sauvage Le choix de termes laudatifs rend sensibles l’admiration et le respect pour cet être exceptionnel, à la fois indépendant et bénéfique. Toujours soucieux de justifier rationnellement ses impressions, l’auteur explique de deux manières cette image : d’abord par l’effet des gratte-ciel, qui repoussent 4 explique de deux manières cette image : dabord par l’effet des gratte-ciel, qui repoussent le ciel  » très loin au-dessus de nos têtes mais aussi par les étendues horizontales infinies des rues. Comme elles, le regard  » file  » à l’horizon (le verbe apparaît deux fois), dans une course qui mène à des milliers de kilomètres de là, vers les autres métropoles, Chicago ou Boston.

La vitesse des voitures évoquée dans le second paragraphe participe à cette mpression de liberté et de grands espaces, comme la métaphore des ‘ grands rails parallèles  » qui suggère les départs toujours possibles. Le champ lexical de la grandeur produit le même effet, avec l’adjectif  » grand  » qui intervient quatre fois, les  » ensembles massifs « , l’  » artère  » ,  » l’avenue les  » routes nationales « . Dernier charme de cette cité, et dernier paradoxe envoûtant, la présence de la nature s’affirme partout. Sartre ne parle pas de Central Park, espace vert immense au cœur de la ville. Plus subtilement, il utilise des comparaisons et des métaphores appartenant au règne minéral ou animal.

Il évoque en effet la splendeur horizontale des plaines andalouses et la verticalité impressionnante des falaises, cadres aussi sauvages que l’animal indéfini, à mi-chemin entre le chien et le loup, désignant le ciel ( » solitaire et pur comme une bête sauvage De plus la véritable nature reste toujours facilement accessible, ne serait-ce que par le regard, puisque  » l’œil peut presque suivre  » une ar S accessible, ne serait-ce que par le regard, puisque  » pœll peut presque suivre  » une artère  » dans la campagne Cette ville que nous savons faite de béton, de fer et de verre offre onc, dans un cadre naturel, une vie ardente, libre et sûre. De tels paradoxes ont séduit Sartre qui termine sa description sur l’un d’eux :  » au cœur de la cité, vous êtes au cœur de la nature « . Et dans tout le texte l’omniprésence du ciel, nommé six fois, équilibre les créations humaines. Le philosophe et romancier européen, élevé dans les livres et les paysages de son continent, sait ici faire preuve d’ouverture d’esprit, et voyager en oubliant ses habitudes, comme le prônait Montaigne dans ses Essais (III, 9,  » De la Vanité  » ).

Il fournit aux lecteurs un mode d’emploi de New York. ais en y ajoutant son enthousiasme, et une poésie visionnaire. En fait il rejoint toute une tradition littéraire française de la découverte d’horizons nouveaux : avant lui Rousseau avait fait aimer les montagnes et la campagne dans La Nouvelle Héloïse et Les Rêveries d’un promeneur solitaire. Chateaubriand avait révélé la grandeur des paysages américains dans Le Génie du christianisme. A la suite de Blaise Cendrars (Pâques à New York) ou d’Apollinaire (Zone), Sartre enrichit notre imaginaire avec ce qui reste d’exotisme en un siècle où la Terre entière est connue : la poésie des grandes villes.