Chambre commerciale, Cour de cassation, 25 mars 1997 – les procédures de redressement et de liquidation judiciaires des entreprises

Introduction Par l’article 1er de la loi du 25 janvier 1985, aux termes duquel « Il est institué une procédure de redressement judiciaire destinée à permettre la sauvegarde de l’entreprise, le maintien de l’activité et de l’emploi et l’apurement du passif », le législateur a clairement exposé la finalité première de la procédure de redressement judiciaire : la sauve arde de l’entreprise, Svip next page prioritairement dans 8 de ce constat que l’O judiciaire ne constitu as un difficulté, mais est a dernier, supposant ai ifficulté.

Il s’infère é e de redressement le débiteur en néflce » de ce e de conditions d’éligibilité relativement à l’ouverture de cette procédure collective. Toutefois, force est de constater que le caractère restrictif desdites conditions entre en contradiction directe avec l’objectif pourtant poursuivi par la loi. L’arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation, en date du 25 mars 1997, constitue une parfaite illustration jurisprudentielle de ce paradoxe.

En effet, une chef d’entreprise (ci-après dénommée « la demanderesse ») avait en l’espèce géré, en société créée de fait, un fonds de commerce de bijouterie de 1985 à 1989. Quatre ns après la fin de sa gestion, en 1993, cette dernière déclarait son état de cessation des paiements aux fins d’être admise au bénéfice d’une procédure de redressement judiciaire.

Néanmoins sa demande fut écartée par les juges du fond, au état de cessation des paiements à l’époque de sa gestion, ce dont il résultait qu’elle ne pouvait prétendre à l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire. Ce faisant, les juges du fond ont opposé à la demanderesse une condition d’antériorité de l’état de cessation des paiements relativement à la cessation de son activité.

C’est dans ces circonstances que cette dernière, n suite de l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Bourges, prit la décision de se pourvoir en cassation. Celle-ci fait notamment grief à l’arrêt de s’être placé au moment de sa gestion pour apprécier si elle était en état de cessation des paiements, alors même que la cessation des paiements doit, selon elle, être appréciée au jour où statue la juridiction, d’où il suit que l’arrêt attaqué aurait violé l’article 3 de la loi du 25 janvier 1985 alors en vigueur.

La chambre commerciale de la Cour de cassation, saisie par la demanderesse, était donc sollicitée afin de se prononcer sur la égalité de la condition d’antériorité de l’état de cessation des paiements, opposée par les Juges du fond. La question posée était simple, mais revêtait un caractère décisif : la cessation des paiements doit-elle être appréciée au jour où la juridiction statue, comme le soutient la demanderesse, ou au moment de la gestion de l’entreprise par le débiteur demandant le bénéfice d’une procédure de redressement judiciaire?

Admettre la première hypothèse revenait à étendre le champs d’application de la procédure visée, le choix de la seconde, au contraire, revenait à le restreindre. Toutefois les juges de droit n’ont pas cru utile de statuer à cet égard, préférant soulever une autre questi les juges de droit n’ont pas cru utile de statuer à cet égard, préférant soulever une autre question de droit, au demeurant tout aussi importante : le commerçant de fait peut-il prétendre au bénéfice d’une procédure de redressement judiciaire?

La Cour répondit par la négative, au motif qu’en vertu de l’article 65 alinéa 1er du décret du 30 mai 1984 (relatif au registre du commerce et des sociétés), qu’elle articula avec la loi du 25 janvier 1985 (relative au redressement et à la liquidation judiciaires des ntreprises), la personne physique non immatriculée au registre du commerce et des sociétés ne peut se prévaloir, tant à l’égard des tiers que des administrations publiques, de la qualité de commerçant, ce dont il résulte qu’elle ne peut prétendre au Aux fins de mieux cerner cette décision, il conviendra, à titre liminaire, de s’intéresser à la qualité de commerçant du débiteur en tant que condition essentielle de son admissibilité au bénéfice d’une procédure de redressement judiciaire (I), avant de voir en quoi cette jurisprudence illustre le fragile équilibre institué par a loi du 25 janvier 1985 entre les intérêts du débiteur et ceux de ses créanciers (Il). Il est précisé que dans le cadre de notre analyse, l’étude se concentre spécifiquement autour de la qualité de commerçant du débiteur en raison des faits de l’espèce, étant entendu que le raisonnement serait le même si le débiteur avait été, en l’espèce, un artisan, un agriculteur ou une personne morale de droit privé. – La qualité de commerçant du débiteur en difficulté essentielle de son admissibilité au béné . ondition qualité de commerçant du débiteur en difficulté : condition ssentielle de son admissibilité au bénéfice d’une procédure de redressement judiciaire Alors que la Cour de cassation était sollicitée aux fins de se prononcer sur la légalité de la condition d’antériorité de rétat de cessation des paiements, opposée par les juges du fond, celle-ci saisit l’opportunité de soulever une autre question de droit portant cette fois sur la qualité de commerçant du débiteur réclamant le bénéfice d’une procédure de redressement judiciaire. En tout état de cause, la Cour était amenée à statuer sur la recevabilité de la demande du débiteur tendant ? ‘ouverture d’une procédure de redressement judiciaire. Il conviendra donc tout d’abord de s’interroger sur les raisons du mutisme de la Cour à l’égard de la condition d’antériorité de la cessation des paiements du débiteur en difficulté, condition de recevabilité avancée par les juges du fond sur laquelle cette dernière aurait théoriquement dû se prononcer (A). uis, dans un second temps, sera mise en exergue la subordination de la qualité de commerçant du débiteur à une immatriculation au registre du commerce et des sociétés (B). A) Le mutisme de la Cour à l’égard de la condition d’antériorité de a cessation des paiements sur la cessation de l’activité La Cour d’appel a rejeté la demande du débiteur en difficulté tendant à Pouverture d’une procédure de redressement judiciaire à son profit, et ce, au motif que ce dernier ne justifiait pas avoir été en état de cessation des paiements à Pépoque de sa gestion. Or, la demanderesse soutient que la cessation des paiements est appréciée non pas au moment de 4 OF gestion.

Or, la demanderesse soutient que la cessation des paiements est appréciée non pas au moment de la gestion de l’entreprise par le débiteur réclamant le bénéfice d’une procédure e redressement judiciaire, mais au jour où statue la juridiction. Celle-ci soutient, au surplus, qu’en se bornant à énoncer qu’elle ne justifiait pas avoir été en état de cessation des paiements au moment de sa gestion, sans plus motiver sa décision, la Cour d’appel aurait violé l’article 455 du Code de procédure civile qui dispose, notamment, que « Le jugement doit être motivé de sorte que l’arrêt attaqué doit être frappé par la nullité prévue ? l’article 458 du même code.

Il en résulte que la Cour de cassation aurait dû, en théorie, se prononcer sur la légalité de la condition d’antériorité de l’état e cessation des paiements, opposée à la demanderesse par les juges du fond : aux fins de dire recevable la demande du débiteur en difficulté tendant à l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire, l’état de cessation des paiements doit- il intervenir au moment de la gestion du débiteur qui réclame le bénéfice de ladite procédure, ou doit-il être apprécié seulement au moment où la juridiction statue? Cette question pouvait également être, in fine, traduite ainsi : le débiteur qui s’est retiré peut-il prétendre au bénéfice dune procédure de redressement judiciaire? La question était primordiale, dans la mesure où la période durant laquelle la cessation des paiements intervient ne correspond pas nécessairement au moment où le débiteur déclare effectivement l’état de cessation des paiements. D’abord parce que le débiteur peut avoir intérêt ? l’état de cessation des paiements.

D’abord parce que le débiteur peut avoir intérêt à ne pas faire preuve de diligence à cet égard, auquel cas celui-ci s’expose au refus du Tribunal de commerce de lui accorder le bénéfice d’une procédure de redressement judiciaire, ensuite, et c’est là l’hypothèse qui nous intéresse, parce ue les difficultés peuvent très bien apparaître postérieurement à sa gestion sans que celles-ci n’aient pu être détectées plus tôt. Admettre la première hypothèse revenait donc à étendre le champs d’application de la procédure de redressement judiciaire, et, a contrario, admettre la seconde revenait à restreindre substantiellement celui-ci. Mais contre toute attente, la Cour de cassation a décidé de ne pas se prononcer sur cette question, préférant statuer sur la qualité de commerçant du débiteur en tant que condition de recevabilité de sa demande.

Ainsi, après avoir rappelé que la demanderesse, our prétendre au bénéfice d’une procédure de redressement judiciaire, devait avoir la qualité de commerçant (puisqu’en l’espèce il se trouvait qu’elle gérait un fonds de commerce), et relevé que tel n’était pas le cas dans la mesure où elle n’avait pas accompli les formalités propres à immatriculer l’entreprise au registre du commerce et des sociétés alors qu’elle y était assujettie, d’où il suit que sa demande ne saurait aboutir, la Cour de cassation a substitué ce motif de pur droit à ceux de la Cour d’appel énoncés plus haut pour dire l’arrêt légalement justifié. Or, ‘est précisément à propos de cette substitution de motifs qu’il convient de s’interroger : pourquoi les juges de droit n’ont-ils pas suivi le raisonnement de 6 OF qu’il convient de s’interroger : pourquoi les juges de droit n’ont-ils pas suivi le raisonnement de la Cour d’appel?

A considérer que le défaut de motivation allégué par la demanderesse eût été établi, l’arrêt attaqué aurait sans nul doute fait l’objet d’une cassation. Toutefois, rien ne justifiait que la Cour de cassation opère une substitution de motifs en vertu de ce seul chef. Faut-il donc considérer que la condition d’antériorité de la essation des paiements sur la cessation de factivité, opposée par la Cour d’appel, ne constitue pas une condition d’éligibilité à la procédure de redressement judiciaire? Cette hypothèse est pourtant à écarter, elle aussi. Puisqu’en effet l’article 1 7 de la loi du 25 janvier 1985, qui définit les conditions d’éligibilité du débiteur retiré des affaires à la procédure collective, pose explicitement cette condition d’antériorité.

D’ailleurs, dans un arrêt en date du 26 octobre 1999 qui sera largement commenté au sein de la doctrine, la chambre commerciale de la Cour de cassation fera une application urisprudentielle de cette dernière au visa dudit article. L’article 17 de la loi du 25 janvier 1985 dispose, à cet égard, que la cessation des paiements doit être antérieure à la radiation du débiteur du registre du commerce et des sociétés (si le débiteur est un commerçant ou une personne morale), ou de la cessation de l’activité (pour les artisans et agriculteurs), ou encore de la publication de la liquidation (s’il s’agit d’une personne morale non soumise à l’immatriculation). Ainsi, à la lecture de cet article, il apparaît également de façon implicite que le commerçant éligible à la procédure de re