Chapitre IV. Le XIXe siècle et le « désenchantement du monde » ou le début de 1’« antimodernité » : Karl Marx Jusqu’à maintenant nous avons vu que la modernité est en train d’être polarisée entre 2 tendances cartésienne et rousseauiste : une mettant l’accent sur les droits individuels, l’individu, et une autre mettant la lumière davantage sur les droits de la société en tant que groupe. Cêtre humain dans ces perspectives se définira soit comme un être isolé du groupe et ayant sa propre quête de sens, soit comme de celui que lui donn Toutefois la définitio qu’à ces 2 tendances. r21 o nextÇEge tirant son sens celui-ci réside. ra It être réduite L’antimodernité jettera un éclairage sur des nuances, des profondeurs encore insoupçonnées. On cherchera à comprendre l’être humain à partir de déterminants. L’homme ne sera plus perçu comme un être faisant des choses (homo laborans ou homo faber) que celui qui est fait par les choses. De cette manière, l’individu ne sera plus tant un être défini à partir de l’idée de liberté.
II sera plutôt vu comme un simple élément de la Nature. Dans ce module nous explorerons un premier aspect de cette détermination l- Introduction L’expression du « désenchantement du monde » provient de l’analyse de Max Weber (dans le Savant et le politique) de la fin du XIXe, début du XXe siècle. Le désenchantement du monde phénomènes, ainsi qu’en contrepartie, la montée (substitution) du rationalisme et de l’intellectualisme (vision scientiste et techniciste du monde) comme mode de vision du monde.
Mais l’expression du « désenchantement du monde » peut vouloir signifier, et signifie également, aussi autre chose encore. Celle-ci marque également que ce phénomène de substitution s’accompagne aussi d’une perte de sens du monde, dès lors que e monde peut être scientifiquement expliqué. En effet, dès lors que tout semblait ou paraissait explicable, tout semble se passer comme si on ne chercherait plus le sens caché des choses.
Comme nous pourrons alors le constater, en traitant de Marx un peu plus tard, le XIXe sera donc une période des plus complexes, voire parfois même paradoxales, autant littérairement, sociologiquement, politiquement, économiquement, etc. qu’il nous faudra bien comprendre. Car le contexte éclaire très bien les sources d’inspiration de la pensée de Marx. Comment le XIXe composera avec ce «désenchantement? D’où et comment naitra fantimodernité?
Le XIXe siècle matérialisa, entre autres choses, ce « désenchantement du monde » ainsi que cette antimodernité, ? travers deux grandes idéologies : d’une part, une critique majeure du captalisme (y compris la philosophie libérale fondant son existence) avec la montée du « mouvement ouvrier (prolétariat) international » dont le communisme fut le principal véhicule, le principal instrument révolutionnaire, et, D’autre part, l’aspiration e PAGF 91 e Fhomme à se délivrer l’entrave, par l’imaginaire et par l’utopisme (impressionnisme, symbolisme, etc. Cette entrave a un nom : le réductionnisme d’un monde unidimensionnel et rationaliste. a) La montée du « mouvement ouvrier » comme critique du capitalisme La montée du « mouvement ouvrier international » sera une conséquence du « désenchantement du monde » que représente le capitaliste (sauvage). Comment en vient-on à mettre sur pieds une organisation, sociale, polltique, communautarienne, etc. qui va prendre autant d’ampleur, par la suite, que l’on nomme essentiellement le communisme? La réponse est relativement fort simple!
IJn élément compose cette réponse : la montée du ibéralisme exacerbé, aidée certes par l’essor également des progrès scientifiques. Qu’est-ce que le libéralisme? Cest une doctrine économique « classique » d’après laquelle une société prône le primat des droits de Flndividu sur ceux du groupe, en général (contralrement à ce que l’on retrouve par exemple chez Rousseau) : incarné par les choix opérés quant à la libre entreprise, la libre concurrence et le libre jeu des initiatives individuelles, etc.
De plus, cette doctrine économique est largement aidée par la juxtaposition d’une autre force en cours, soit celle de l’essor du rogrès scientifique. L’application de la machine à vapeur aux autres champs sociaux caractérise également le XIXe siècle . chemin de fer Où cela a-t-il mené, aux yeux de plusieurs analystes, le XIXe et le début Mes siècles?
L’exploitation massive des ouvriers au sein de tous les pays industrialisés• l’aliénation des valeurs, telles : la liberté (les ouvriers n’avai ception d’être libr valeurs, telles : la liberté (les ouvriers n’avaient plus la perception d’être libres, mais plutôt une vision esclavagiste), l’égalité (il y avait les bourgeois, propriétaires des moyens de production, t les autres, etc. ; les diverses rébellions occasionnées par ces « injustices le goût pour eux de « se prendre en main Comme si ce n’était pas encore assez : le XIXe siècle marque également l’essor, avec les découvertes des nouveaux continents, des avancés concernant le colonialisme et l’impérialisme. On avait besoin de capitaux et de nouveaux débouchés à nos produits. On en arrive à exporter notre culture, et contribuer à détruire, forcément, les autres cultures.
C’est la culture de domination, et d’exploitation à grand déploiement. Le capitalisme, laissé aux seules mains d’une « classe sociale llait faire en sorte, à son insu, de faire surgir paradoxalement aussi un contre-courant, celui du socialisme, en particulier d’une de ses formes possibles, celle du communisme. Mais fallait-il encore un autre ingrédient, comme ferment à la patte : la montée d’un utopisme.
La montée d’un certain utopisme marque également un certaln « désenchantement du monde axé uniquement sur la rationalité. Observant à ce moment les conditions abominables dans lesquelles ils sont livrés, les individus aspirent alors à mieux. b) La montée également de l’aspiration à un certain utopisme ? la montée du « mouvement ouvrier international » se jumèle un autre élément contribuant à expliquer, du moins en partie, la pensée de Karl Marx : se met en place l’idéologie utopiste ? caractère politique.
Le soclallsme ou l’esprit communautarien, bien qu’il 1 l’idéologie utopiste à caractère politique. Le socialisme ou l’esprit communautarien, bien qu’il ne soit pas tout à fait nouveau, on note même des racines remontant, par exemple, aux premiers chrétiens, celui-ci entame néanmoins une phase de politisation, jamais encore connue. Cette idéologie prend encore e plus en plus d’ampleur en raison surtout — et comme nous en avons déjà parlé, — de la misère rencontrée par le prolétariat.
Autrement dit, ceux ou celles qui n’étaient pas propriétaires des moyens de production, à partir desquels, ceux-ci allaient vendre leur « force de travail », en échange d’un salaire, toujours moindre que le profit dont les propriétaires, eux, pouvaient en tirer profit. C’est de là, comme on peut facilement se Fimaginer, que des gens, plus précisément, des prolétaires, qui ont eu l’idée alors de fonder une société, à partir d’idéaux plus nobles encore, fondée lors sur une autre base, une réelle liberté, une réelle égalité, une idée de « propriété non plus individuelle, mais collective etc.
La force du XIXe, contrairement aux autres époques, est de lui avoir donne une portée et une signification politique, à cette aspiration. De ce double mouvement, montée du « mouvement ouvrier international » et de la politisation lente, mais certaine de cet utopisme communautarien, naitra le XIXe siècle. C’est donc dans ce contexte que s’inscrit notre prochain grand auteur à l’étude dans la présente session : il s’agit de Karl Marx. Vocabulaire marxiste Bourgeois
Dans la théorie marxiste, la bourgeoisie est la classe sociale dominante qui, dans un pays capitaliste, détient les moyens de Modes de production PAGF s 1 sociale dominante qui, dans un pays capitaliste, détient les moyens de ils sont composés de la main-d’œuvre, des sujets du travail et des instruments de travail. Pour faire une comparaison, les moyens de production correspondraient à la terre et à la pelle dans une société agricole, et aux mines et aux usines dans une société industrielle. Prolétariat Selon la définition de Marx et des marxistes, le prolétariat est constitué de l’ ensemble des salariés et des chômeurs
Communautarisme Employé dans un sens plutôt péjoratif, le terme communautarisme désigne une forme d’ethnocentrisme ou de sociocentrisme qui donne à la communauté (ethnique, religieuse, culturelle, sociale, politique, mystique, sportive… ) une valeur plus importante qu’à l’individu, avec une tendance au repli sur soi. Ce repli « identitaire », « culturel » ou « communautaire » s’accompagne d’une prétention à contrôler les opinions et les comportements des membres de la communauté contraints à une obligation d’appartenance.
Matérialisme Le matérialisme est un point de vue philosophique qui fait de a matière la seule réalité, la seule substance : toute chose est formée de matière, et tout phénomène peut s’expliquer comme le résultat d’interactions matérielles. Matérialisme historique Le matérialisme historique est une conception matérialiste de l’histoire. Cette doctrine permet une analyse de l’histoire, des luttes sociales et des évolutions économiques et politiques fondées sur leurs causes matérielles, en particulier l’histoire des classes sociales, de leurs ra orts et de leur évolution.
PAGF 1 leur évolution. Matérialisme dialectique comme l’enchaînement des contradictions qui engendrent ‘histoire de l’humanité : celle-ci est une suite logique de forces qui se combattent pour en faire surgir de plus grandes. Classes sociales Karl Marx (1818-1883) définit les classes sociales par rapport ? leur position et à leur rôle dans le processus de fabrication. ll- Le philosophe, le penseur a) Ses origines Karl Heinrich Marx est né le 5 mai 1818 à Trèves en Rhénanie et mort le 14 mars 1883 à Londres.
Karl Heinrich Marx est né à Trèves (aujourd’hui en Rhénanie- Palatinat) en 1818 alors sous domination prussienne. Il est le deuxième d’une fratrie de huit enfants. Son père, Herschel Marx (1782-1838), avocat issu d’une famille de rabbins et de marchands, s’est converti au protestantisme en 181 6 ou 1817 pour pouvoir exercer sa profession, et a changé son prénom en Heinrich. Sa mère, Henriette Pressburg (1788-1863), est issue d’une famllle juive hollandaise. Karl Marx est baptisé dans le luthéranisme en 1824 et confirmé à l’église de la Trinité de Trèves en 1834. ) Marx, l’inclassable Sil est un auteur qu’on a p PAGF 7 1 , en tant que penseur, doctorat: Différence de la philosophie de la nature chez Démocri- te et Épicure (Differenz der demokritischen und epikureischen Naturphilosophie). Marx est reçu docteur de la faculté de philosophie de l’université de Léna le 15 avril 1841. c) Ses principales influences Ses deux auteurs et philosophes l’ayant le plus influencé sont certes : Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770-1831) et Ludwig Andreas Feuerbach (1804-1872).
L’influence certaine du premier est à chercher des côtés de l’idée de dialectique et du rôle des Idées dans l’histoire (les matérialismes historiques et dialectiques). L’influence du deuxième est plus à trouver du côté de sa critique des religions dans le monde, historiquement parlant (la religion, opium du peuple). ) Les 2 grands axes de sa pensée Essentiellement, la philosophie de Marx tourne autour de deux axes principaux, s’interconnectant dès qu’il faut se garder de ne jamais confondre : le matérialisme historique et le matérialisme dialectique.
Le premier recherche la « Raison » dans (de) l’histoire. Le deuxième cherche plutôt la « dynamique » des rapports entre les hommes (micro) ou entre les sociétés (macro). i- Le matérialisme historique (la science de l’histoire) Marx cherche La « Raison » dans l’histoire. D’une part, Marx articule sa philosophie, d’abord et avant tout, ? artir du dessein de fonder une nouvelle science, exacte, soit une histoire scientifique. Marx lui donnera le nom du « matérialisme historique En quoi cette nouvelle science diffère-t-elle de fhistoire qui avait cours jusqu’à ce moment-là?
Fondamentalement, nous dirons deux choses. Premièrement, au lieu de 91 nous dirons deux choses. Premièrement, au lieu de voir l’histoire comme un amoncellement de dates, sans aucun rapport entre celles-ci, Marx eu l’idée plutôt de chercher à comprendre l’histoire à partir d’une « logique » inscrite à l’intérieur même des « choses », d’où l’idée u « matérialisme ». Pour lui, il n’y aurait pas d’autres éléments explicatifs du monde et des phénomènes que ceux qu’on peut y observer, ici, sur terre. Il n’y aurait pas d’explication en dehors des causes matérielles.
Deuxièmement, ces causes explicatives recherchées auraient tralt surtout à une sphère ou une institution en partlculier de la société, soit l’économie. Plus tard, les néo-« marxistes » prendront de la latitude par rapport à cette contrainte, voire jusqu’à même ne plus la prendre en compte. En outre, qu’est-ce qui chicote dans l’économie Marx? Ce sont les « modes de production Examinons cela plus en détail. Voici donc ce que nous avons vu : les moyens de production et d’échange, sur la base desquels s’est édifiée la bourgeoisie, furent créés à l’intérieur de la société féodale. ? un certain degré du développement de ces moyens de production et d’échange, les conditions dans lesquelles la société féodale produisait et échangeait, l’organisation féodale de l’agriculture et de la manufacture, en un mot le régime féodal de propriété, cessèrent de correspondre aux forces productives en plein développement. Ils entravaient la production au lieu de la faire progresser. Ils se ransformèrent en autant de chaînes. II fallait les briser. Et on les brisa.
Karl Marx, Le Manifeste Au cours de l’histoire, plus les sociétés avancent, progressent, plus les modes Le Manifeste plus les modes et les « moyens de production » évoluent, note Marx. À tel type de société correspond tel type de « mode de production b. Par exemple, on observe historiquement les passages des modes de production, tels : le troc, avant les premières colonies; la manufacture, avec les premières colonies; ne suffisant plus à la tâche, le machinisme remplaça la manufacture avec la division du travail l’accompagnant vers le ilieu du XIXe; les marchés mondiaux, fin du XIXe; etc.
Le mode de production est un des concepts fondamentaux de Marx. La succession des modes de production peut être schématisée de la manière suivante : du communisme primitif on passe au mode de production esclavagiste, féodal, capitaliste, et enfin socialiste / communiste (les deux termes sont alors synonymes). Marx note également que ce n’est pas les grandes idéologies (Hegel) qui construisent la société ou font en sorte à ce qu’on assiste à des grands changements dans la société. Pour Marx, c’est même plutôt finverse.
Cest cela aussi « remettre la pensée de Hegel sur les deux pieds Y. Ce sont plutôt les conditions sociales, plus précisément, les modes de productions qui vont faire en sorte de faire surgir, tel type d’idéologie. Autrement dit, les idéologies sont des produits des structures ou rapports sociaux. Par exemple, à tel type de moyen de production correspond tel type de religion. Par exemple, ridée de « tolérance religieuse » ou « liberté de conscience » n’apparait pas, pour Marx, à n’importe laquelle des époques. Elles apparaissent lorsque justement et précisément les rapports éc