Le Bonheur

Si l’on se fie au sens commun, on pourra penser que le bonheur consiste dans l’assouvissement intégral des besoins t désirs. Le bonheur est ce qui nous comble. Si nous acceptons S t o n page une telle définition, n’ jamais être heureux . Car ce qui nous « co répondre à l’intégrali complète des désirs 3 S. v. p next page ndamné à ne même définition ? besoin de r s, la satisfaction ouvissement d’un désir est très souvent l’origine d’un nouveau désir de telle manière que la quête du bonheur serait sans fin, et tout choix implique qu’un privilège soit donné à certaines aspirations, au détriment d’autres.

De plus, le bonheur est communément conçu comme un état stable et permanent, comme une « paix ntérieure », ce qui ne coincide pas avec l’idée de la satisfaction des désirs car ceux-ci sont justement ce qui ne cesse de venir perturber tout « repos » dans un état déterminé. En ce sens, le bonheur s serait plutôt la conséquence d’une maitrise des inclinations, voire d’une faculté (souvent dite morale) de supprimer ou de réduire au silence les désirs qui viendraient troubler cette « paix Y.

Mais la possibilité d’exercer un empire sur tous nos désirs ne semble pas moins hors de portée que celle de tous les satisfaire. La problématique du bonheur se situe au croisement de deux problématiques, difficilement onciliables, celles du plaisir et celle de la moralité. Le bonheur — entre plaisir et vertu (Socrate et les sophistes) « Un plaisir pourrait s’identifier avec le plus grand bien, même en admettant que la plupart des plaisirs se trouvent être absolument mauvais.

Pour cette raison, tout le monde estime que la vie heureuse est agréable, attendu qu’on unit la notion de plaisir celle de bonheur, et l’on a parfaitement raison. Aucune activité, en effet, n’est complète quand elle est contrariée, et le bonheur présente le caractère d’être complet. Ainsi l’homme heureux a-t-il besoin que les biens orporels, les biens extérieurs et ceux de la fortune se trouvent réalisés pour lui sans difficultés » Aristote, Éthique à Nicomaque.

Calliclès dans le Gorgias, affirme que le bonheur est tributaire de ce que la nature a conféré à chaque homme ; est heureux celui chez qui, par nature, existe un équilibre entre les désirs et les facultés. Le plus heureux sera celui qui aura les désirs les plus grands et le plus de moyens de les assouvir (un tyran par exemple). Le bonheur est donc inséparable du plaisir (c’est ce qu’on appelle l’hédonisme) et, plus encore, se mesure à Pintensité de ce pla 20F 13 laisir (c’est ce qu’on appelle l’hédonisme) et, plus encore, se mesure à l’intensité de ce plaisir.

Socrate cherche à faire entendre à Calliclès que les désirs ont quelque chose d’incontrôlable et qu’ils tiennent en leur pouvoir celui qui s’adonne à la jouissance sans limites, le « débauché Dans le Philèbe, Socrate se livre à une critique d’une plus grande portée. Le plaisir, dit-il, appartient au genre de l’illimité, ce qui implique qu’il ne possède pas une nature propre et ne peut par conséquent pas être un bien en lui-même. La « vie de plaisir » est marquée du sceau de l’incomplétude. Dans le Protagoras, Socrate esquisse une autre compréhension du plaisir.

Un plaisir peut être bon lorsqu’il contribue au bonheur de l’individu ; il est mauvais lorsqu’au contraire il met en danger ce bonheur tout en paraissant le servir. Pour Platon, le bonheur dépendra de la présence en l’âme du bien qui lui est propre, la justice. Selon Aristote, la recherche du bonheur est recherche du souverain bien, c’est-à-dire du bien qui n’est recherché que pour lui-même. Ce bonheur est propre à l’homme ; il consiste nécessairement en des actions qui expriment l’essence de l’homme.

Le bonheur repose par conséquent sur la conformité à la raison et la vertu. Les actions vertueuses dépendent d’une rationalité pratique baptisée prudence (phronèsis). Mais en un autre sens il ne se mesure qu’à l’aune d’une vie entière ; ce n’est qu’au terme de la vie d’un homme qu’on peut savoir s’il a été heureux. Cela revient à dire que la vertu ne suffit pas au bonheur, que le bonheur exige des choses subies, un corps en bon 30F 13 dire que la vertu ne suffit pas au bonne santé, des biens extérieurs, en résumé de la fortune (de la chance b).

L’infortune, les maux, sont incompatibles avec le onheur ; le plaisir ne l’est pas bien qu’il puisse le devenir lorsqu’il excède toute mesure. ‘épicurisme « Quand nous disons que le plaisir est le but de la vie, il ne s’agit pas des plaisirs déréglés ni des jouissances luxurieuses ainsi que le prétendent encore ceux qui ne nous connaissent pas, nous comprennent mal ou s’opposent à nous. Par plaisir, c’est bien l’absence de douleur dans le corps et de trouble dans l’âme qu’il faut entendre.

Car la vie de plaisir ne se trouve point dans d’incessants banquets et fêtes, ni dans la fréquentation de jeunes garçons et de femmes, ni dans la saveur des oissons et des autres plats qui ornent les tables magn’fiques, elle est dans la tempérance, lorsqu’on poursuit avec vigilance un raisonnement, cherchant les causes pour le choix et le refus, délaissant l’opinion, qui avant tout fait le désordre de l’âme. » Épicure, Lettre à Ménécée. Épicure ne défend en rien une recherche immodérée du plaisir, une soumission totale aux impulsions.

Si la vie de plaisir est pour lui la seule qui peut conduire au bonheur, c’est seulement parce qu’elle conduit à un état de tranquillité, de paix de l’âme, d’indépendance à l’égard des sollicitations intérieures et xtérieures. Épicure distingue plusieurs formes de plaisirs. Il sépare notamment les plaisirs qui viennent combler un manque organique ou psychique et les désirs qui provien 4 3 notamment les plaisirs qui viennent combler un manque organique ou psychique et les désirs qui proviennent au contraire d’un état de satiété. Les premiers sont dits cinétiques : ce sont des mouvements.

Les seconds sont dits catastématiques : ils sont constitutifs des êtres, propres à leur constitution physique, ou encore connaturels. Selon Épicure, le bonheur consiste en ces désirs catastématiques caractérisés tout la fois par leur grande intensité et par le fait qu’ils ne perturbent pas l’équilibre de celui qui l’éprouve. Cela ne signifie pas pour autant que tous les plaisirs cinétiques doivent être condamnés car certains d’entre eux peuvent également contribuer à l’équilibre. Le bonheur évoqué par Épicure se définit avant tout comme absence de douleur du corps (aponia) et absence de troubles de l’âme (ataraxia).

Le bonheur, c’est donc l’absence de peine ; c’est pourquoi la recherche du plaisir peut, paradoxalement, devenir un ascétisme. Cette réduction du bonheur à l’absence de douleur peut sembler tout à fait nsuffisante ; tout au mieux aurait-t-on tendance à penser que cette absence n’est qu’une condition minimale du bonheur. L’utilitarisme On peut dire d’une action qu’elle est conforme au principe d’utilité ou plus simplement qu’elle est utile (relativement à la société en général) lorsque sa tendance à accroître le bonheur de la société est supérieure à ce qui la diminue.

On dira d’une action gouvernementale (qui n’est qu’un cas d’action accomplie par une ou plusieurs personnes) qu’elle est conforme ou commandée par le principe d’utilité, lorsque de la même façon, 3 Unable to process your request now. Please try again latere 6 3 place dans une société qui garantit la sécurité des biens. C’est pourquoi Mill peut écrire que l’intérêt fondamental n’est pas « le plus grand bonheur de l’agent lui-même, mais la plus grande somme de bonheur totalisé ».

Caction qui sera source du plus grand bonheur sera donc celle qui maximisera le bonheur pour le plus grand nombre. Le bonheur est ainsi susceptible d’un calcul de félicité. Le stoïcisme « Ajoutez encore que le plaisir s’arrange de l’existence la plus honteuse mais que la vertu ne consent pas à une vie mauvaise ; il y a des malheureux à qui le laisir ne fait pas défaut, et même dont le plaisir cause le malheur, ce qui n’arriverait pas si le plaisir était mélangé la vertu, mais la vertu existe souvent sans le plaisir et n’a jamais besoin de lui.

Pourquoi rapprocher des choses si dissemblables et même si opposées ? La vertu est chose élevée, sublime, royale, invincible, inépuisable ; le plaisir est chose basse, servile, faible, fragile qui s’établit et séjourne dans les mauvais lieux et cabarets. » Sénèque, De la vie heureuse. Les stoïciens refusent l’idée selon laquelle les hommes seraient originellement mus par la recherche du plaisir.

Ils affirment au contraire que les impulsions premières découlent de l’appropriation à lui-même de tout être en vertu de laquelle il accomplit les actions qui conviennent à sa nature. Ainsi, un enfant qui s’exerce à marcher et qui ne cesse de chuter, de se faire mal, n’est pas guidé par le plaisir mais par l’impulsion exprimer sa propre nature. Sénèque affirme par ailleurs qu’il est impossible de confondre bonheur et plaisir sa propre nature.

Sénèque affirme par ailleurs qu’il est impossible de confondre bonheur et plaisir, le premier étant un état durable, le second un sentiment éphémère : « le plaisir rrivé à son plus haut point s’évanouit ». Le bonheur, identifié au souverain bien ou encore à la vertu, est « immortel, il ne sait point s’en aller, il ne connaît ni satiété ni regret Le plaisir ne lui est par conséquent aucunement nécessaire. La vertu doit s’affranchir des passions L’âme les subit, en « pâtit ».

Il ne s’agit pas pour les stoïciens de détruire les impulsions mais de les redresser, de les faire participer à la recherche d’une vie conforme à notre nature. Cette conformité exige une connaissance de l’ordre naturel par laquelle l’homme comprend a place qu’il occupe dans le monde, comprend qu’il est luimême une partie de ce tout, que sa raison est un fragment de la raison divine gouvernant le monde. Le bonheur pour les stolciens consiste dans l’absence de troubles de l’âme (ataraxia).

Le sage, seul véritablement heureux, ne néglige pas les devoirs sociaux ; il les accomplit au contraire tous, comme les autres hommes, à cette différence près que lui seul les accomplit vertueusement, c’est-à-dire avec la conscience de réarser par là sa nature propre. Bonheur et moralité « Le concept du bonheur est un concept si indéterminé, que, algré le désir qu’à tout homme d’arriver à être heureux, personne ne peut jamais dire en termes précis et cohérents ce que véritablement il désire et il veut.

La raison en est que tous les éléments qui font partie du concept de bonheur sont dans leur ensembl B3 raison en est que tous les éléments qui font partie du concept de bonheur sont dans leur ensemble empiriques, c’est-à-dire qu’ils doivent être empruntés l’expérience ; et que cependant pour l’idée de bonheur un tout absolu, un maximum de bien-être dans mon état présent et dans toute ma condition future, est nécessaire. Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs.

Kant accepte la définition du bonheur comme « satisfaction de toutes nos inclinations tant en extension, c’est-à-dire en multiplicité, qu’en intensité, c’est-à-dire en degré, et en protension, c’est-à-dire en durée ». Un tel bonheur, selon lui, est idéal de l’imagination en ce que la satisfaction complète ne peut être réalisée. Mais il n’en demeure pas moins que c’est la raison elle-même (faculté de penser Fabsolu, l’inconditionné) qui est conduite à supposer la possibilité d’un tel bonheur ; nous ne pouvons y renoncer.

Kant précise qu’il ne faut pas confondre, comme le font toutes les théories eudémonistes, le souverain bien et le bonheur. Le bonheur dépend de la satisfaction de nos penchants, pour la plupart égoïstes ; il est déterminé par des motifs empiriques et est réfractaire à toute universalisation. Au contraire, le souverain bien relève de la conduite morale qui est déterminée par la 101 purement rationnelle (non sensible) et qui satisfait le principe d’universalisation de la maxime (règle) de l’action. La conduite morale relève de l’impératif catégorique, la recherche du onheur de l’impératif pragmatique.

Ily a néanmoins une relation entre la vertu et le bonheur. La vertu ne produit pas le bonheur y a néanmoins une relation entre la vertu et le bonheur. La vertu ne produit pas le bonheur mais le pense comme une conséquence méritée ; la vertu nous apprend à « nous rendre dignes du bonheur ». Mais elle nous le promet si peu que l’imagination est poussée imaginer une autre vie dans laquelle cette récompense serait garantie par l’application d’une justice bienveillante. Ce rapport de la vertu au bonheur est donc aussi un des liens essentiels ntre conscience morale et sentiment religieux, entre devoir et esperance.

Désir et ennui « Le désir, de sa nature, est souffrance ; la satisfaction engendre bien vite la satiété ; le but était illusoire ; la possession lui enlève son attrait ; le désir renaît sous une forme nouvelle, et avec lui le besoin ; sinon, c’est le dégoût, le vide, l’ennui, ennemis plus rudes encore que le besoin. » Schopenhauer, Le Monde comme Volonté et comme représentation. Schopenhauer refuse l’idée que la satisfaction totale des désirs s’identifie à la plénitude ou à la tranquillité.