VOLTAIRE ET LE « SAUVAGE CIVILISÉ » A Thesis Presented to The Faculty of the Department of World Languages and Literatures San José State University n Partial Fulfillment of the Requirements of the Degree Master of Arts by Christopher J. Barros May 2010 UMI Number: 14773 All rights reserved 54 p g INFORMATION TO ALL USERS The quality of this reproduction is dependent upon the quality of the copy submitted. n the unlikely event that the author did not send a complete manuscript and there are missing pages, these will be noted. Also, if material had to be removed, a note will indicate the deletion. UMI 1477356 Copyright 2010 by ProQuest LLC. All rights reserved. This edition of the work is protected against unauthorized copying under Title 17, United States Code. myth of the « noble savage, » an image that was widespread in the literature, imagination, and theater of the 17th and 18th centuries.
For many people at that time, the « bon sauvage » embodied a certain happiness, simplicity, and equality that were lost when humankind exited its « primitive » state and became « civilized. » Rousseau’s Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes, hich was vehemently criticized by Voltaire, greatly popularized the myth of primeval bliss, a myth which is still With us today. In various works by Voltaire, such as Alzire, ou les américains, L’Ingénu, Candide, and Dialogues, « savages » play important roles.
This research demonstrates that, despite his disdain for the theory of humankind’s natural goodness in its primitive state, Voltaire hlmself created his very own « savage. » While Rousseau’s « noble savage » leads one to condemn civilization as the root of human degeneration while at the same time Inspiring a return to primitive nature, Voltaire’s « savages » exalt ivilization, education, and the scientific ethos of the Enlightenment.
They are his advocates, or mouth pieces, for his call to tolerance, justice, scientific enterprise, and a government guided by reason. TABLE OF CONTENTS ntroduction Chapitre 1 : Les origines e 2 DE vthe du bon sauvage et le « sauvage » tolérant 78 Chapitre 5 : Le « sauvage civilisé » et le jardin social et politique 99 Conclusion Bibliographie 125 Introduction Dans la scène IV de l’acte Ill d’Arlequin sauvage (1721), comédie de Deslile de la Drevetière, Arlequin ramasse les pièces d’un miroir que Flaminia a laissé tomber.
Quand il aperçoit son image dans le miroir il ne se rend pas compte que c’est lui-même et pense qu’il y a quelqu’un d’autre là-dedans. Il est étonné par cette merveille même après que Flaminia lui explique ce qu’il voit On nomme cela un miroir. Cest un secret que nous avons pour nous voir ; car ce que tu vois n’est que ton image que cette glace réfléchit, et il en fait de même de toutes les choses qui lui sont résentées.
Arlequin lui répond : 3 OF autochtones américains et leur monde sont devenus le langage et le matériel visuel à travers lesquels les Européens communiquaient et éveloppaient non seulement leur sentiment d’identité, de progrès social et culturel et de justice, mais aussi la Delisle de la Devretière, Arlequin sauvage (Paris : Chez Briasson, 1731). 2 recherche de la connaissance de ce qu’est la nature humaine. ? travers les siècles, cette importante question, si l’homme est bon ou mauvais par la nature, a engendré le mythe du bon sauvage. Ce mythe, rendu plus célèbre encore par le Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes de Rousseau, affirmant la bonté naturelle de l’homme, perdure aujourd’hui. Souvent la question sur la nature humaine a été formulée dans un contexte qui visait une opposition entre la vie sauvage et la vie en société. Dans quel mode d’existence l’homme cultive-t-il le mieux son jardin ?
L’humain est- il né bon ou mauvais, dans quel endroit la nature humaine se trouve-t-elle ? son meilleur état et, selon la réponse, quel est le meilleur programme pour régler les problèmes sociaux ? Voltaire et Rousseau n’ont pas été les premiers à se pencher sur ce problème. Aristote, au IVe siècle avant notre ère, avait déclaré ue, l’état étant quelque chose qui existe 4 OF mployé les anciennes images de « l’autre » mais a posé la question : comment cultive-ton son jardin afin de créer le meilleur des mondes ?
Voltaire nous a donné sa réponse ? cette ancienne question à travers ses personnages « sauvages » dans Alzire, ou les Américains, Candide, ou l’optimisme, L’Ingénu et le personnage nommé simplement « le sauvage » dans son Entretiens entre un bachelier et un sauvage. À la surface, les images « sauvages » créées par Voltaire semblent manquer d’unité et de cohésion. Quel a été le Aristote, The Politics, ed. Trevor J. Saunders (New York, New York: Penguin Books, 1992) 59. point de vue de Voltaire par rapport aux autochtones américains? Lesquelles de ces images représentent sa philosophie de l’homme et son projet pour l’amélioration sociale ? Les Incas avancés et sophistiqués de sa pièce Alzire, ou les Américains, les grosses caricatures trouvés dans Candide, ou le sauvage-philosophe dans l’Ingénu? Est-ce que ces images sont contradictoires ou possèdent-elles une cohérence qui transcende les œuvres individuelles pour trouver leur unité dans la philosophie de leur auteur ?
Cunité derrière ces quatre personnages littéraires, qui à la surface emblent avoir plus de différences que de similarités, se trouve dans le rôle qu’ils ont en commun. Chacun est le porte-parol ce que leur créateur, S DE C’est dans le jardin, symbole de la société, que nous trouvons l’unité entre ses images dramatiques et littéraires. Les sauvages voltairiens sy réunissent parce que, malgré leurs différences, chaque personnage arrive, ou amène le lecteur ou spectateur, à la même conclusion, qu’il faut « cultiver son jardin. ? Ce que Voltaire a voulu dire par « il faut cultiver son jardin » est ce que les personnages cités ci-dessus inspirent au lecteur – penser et ultiver son jardin intellectuel à travers l’éducation, son jardin social avec des lois plus justes et raisonnables, et son jardin religieux à travers un culte rationnel (cultivé par la raison) et sans fanatisme. Ainsi, c’est par l’image du jardin et par ses « sauvages » que Voltaire s’oppose à la théorie de la bonté naturelle de l’origine et de la dégénérescence causée par la civilisation.
Selon Voltaire, on améliore la société de la même manière qu’on cultive un 4 jardin d’herbes. On le fait en arrachant les mauvaises herbes, comme le fanatisme ou les mauvaises institutions, comme la torture, et en « arrosant » ce u’il y a de bon et d’utile dans la société. C’est ainsi qu’on corrige les problèmes sociaux et que se construit « le meilleur des mondes possibles. » Il faut valoriser et non mépriser le progrès qui a déj? été fait pendant les siècles passés dès le moment où l’homme est sorti de son état primitif de barbarie.
S OF signifie celui qui appartient à la forêt) sera souvent utilisé sans valeur péjorative, avec la valeur conceptuelle qu’il a au XVIIIe et pour rendre plus clairs les arguments de notre étude, surtout quand il s’agit des références directes aux écrivains et aux penseurs que nous ?tudions. Par exemple, dans les discours sur les conceptions des philosophes en question il sera obligatoire de dire « le sauvage voltairien » au lieu de dire « l’autochtone appelé sauvage par Voltaire. ? Cela nous aide aussi à distinguer le « sauvage voltairien » des autres « sauvages » des philosophes de son époque. La nomenclature, comme nous le voyons ci-dessous, est essentielle à notre thèse. Ter Ellingson dit que le mythe du bon sauvage a ses origines au XVIIe siècle dans les œuvres ethnographiques de Lescarbot ainsi que dans les descriptions ethnographiques des voyageurs au nouveau monde. Dans son étude du discours du bon sauvage dans la pensée occidentale, Ellingson suggère que le sujet de son livre est plutôt le mythe du mythe du bon sauvage que le mythe du bon sauvage lui-même.
Il dit que le terme « Bon Ter Ellingson, The Myth of the Noble Savage (Berkeley: University of California Press, 2001) 13. 5 Sauvage » a été inventé en 1609 ar Marc Lescarbot, avocat et ethnographe français, et OF thèse est qu’alors que les termes « bon » ou « noble sauvage » n’ont pas été explicitement employés avant la deuxième moitié du dix-neuvième siècle, ce mythe n’a pas vraiment xisté mais a été inventé et projeté sur le passé, et sur Rousseau, par de mauvaises lectures et des interprétations erronées des sources historiques.
I explique aussi la différence entre les termes anglais et français pour les autochtones, « noble savage » e anglais et bon sauvage » en français. Le terme anglais « noble, » explique Ellingson, a été employé pour mettre l’accent sur les qualités que les autochtones américains partageaient avec la noblesse européenne. Les explorateurs européens ont compris la culture des « sauvages » à travers les catégories et définitions européennes.
Le fait que les Amérindiens avaient tous le droit de faire la chasse, un privilège de la noblesse et de la royauté en Europe, ainsi que l’importance qu’ils donnaient à la guerre, a été interprétée comme preuve de leur « noblesse. » [Yun autre côté, la nomenclature française « bon » suggère d’autres attributs au-delà de la noblesse. Dans cette thèse, nous démontrons que l’esprit derrière l’image du sauvage, qu’il soit « bon sauvage » ou « noble savage, » est la même chose. Ces images, malgré leurs noms différents, sont profondément enracinées dans la psyché occidentale.
Elles représentent une fascination, admiration et crainte que la nature indomptée inspire. Une 8 OF plusieurs sources du XVIIIe siècle démontre qu’en essence l’idée du bon sauvage existait bien avant 1859. L’Encyclopédie (1751-72) donne la suivante définition des « sauvages » : tous les indiens qui ne sont point soumis au joug du pays, & qui vivent à-part. La liberté naturelle est le seul objet de la police des sauvages ; avec cette liberté, la nature & le climat dominent presque seuls chez eux.
Occupés de la chasse ou de la vie pastorale, ils ne se chargent point de pratiques religieuses n’adoptent point de religion qui les ordonne. 5 De plus, Adario, l’Ingénu de Voltaire et d’autres représentent irréfutablement les caractéristiques du « sauvage » mythique. Sylvain Maréchal, en effet, en 1793 reprend encore l’image du bon sauvage dans e jugement dernier des rois. Présentée pendant la Révolution française et bien après la mort de Voltaire, cette pièce comporte plusieurs éléments du mythe rousseauiste.
Soutenant l’idée que « La nature a fait l’homme heureux et bon, mais la société le déprave et le rend misérable, »6 les autochtones de cette pièce incorporent l’esprit du ? bon sauvage » de Rousseau, mais surtout l’idéal révolutionnaire à l’état brut. L’action a lieu sur une île tropicale, jardin paradisiaque. Ces sauvages nus sont hospitaliers, généreux, paisibles et simples : Braves Sans-culottes, ces sauvages sont nos ainés en liberté : car ils n’ont jamais eu de rois. Nés libres, ils vivent et meurent comme ils sont nés. 9 OF des sciences, des arts et des métiers Tome XIV (Stuttgart-Bad Cannstatt : Friedrich Frommann Verla& 1967) 729. 6 Jean-Jacques Rousseau, Œuvres complètes de Jean-Jacques Rousseau Tome IX (Paris : Hachette, 1883) 287. Sylvain Maréchal, Le jugement dernier des rois (Comédie Française, Paris, 1794). 7 e vieillard, personnage principal de cette pièce, a été exilé sur Ille par un roi français qui avait enlevé sa fille. Les autochtones qu’il rencontre, en plus de vivre sans rois, sans lois et sans prêtres, n’ont pas de religion organisée.
Donc, il est évident que l’image du bon « sauvage » opposée par Voltaire existait bien avant le XIXe siècle. Afonso Arinos de Melo Franco, compatriote des « sauvages » brésiliens, a écrit un livre dans lequel il examine l’histoire, le développement et le rôle du mythe du bon auvage et de la théorie de la bonté naturelle en France dès l’âge des découvertes jusqu’? la prise de la Bastille en 1789*8 Cet homme politique donne ? l’image des autochtones brésiliens un rôle essentiel dans le développement de la philosophie qui a amené les Français à leur révolution.
Il suggère que la théorie de la bonté naturelle, un des plus importants articles de l’idéologie révolutionnaire, est directement liée aux « sauvages » imaginaires mentionnés dans la littérature européenne, et que ces « bons sauvages » sont composés d’impressions ones (spécifiquement 00F 154